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Conflit israélo-palestinien : les raisons de léchec de la médiation américaine

jeudi 13-septembre-2018

Alors que les accords d’Oslo fêtent leurs 25 ans le plan de paix entre Israël et Palestine promis par Donald Trump n’a toujours pas vu le jour.
A son arrivée à la Maison-Blanche Donald Trump se voyait déjà résoudre le conflit israélo-palestinien. « Honnêtement c’est peut-être moins difficile que ce que les gens pensent depuis des années » prétendait-il en mai 2017. Un an et demi plus tard le président américain est forcé de constater que sa stratégie n’est pas plus efficace que celle de ses prédécesseurs. La présidence américaine assure toutefois que son plan de paix – un « projet extraordinairement ambitieux » – n’est « absolument pas abandonné ». Mais la présentation du projet sur lequel travaille Jared Kushner le gendre de Donald Trump n’en finit plus d’être reportée. Voici les raisons de cet échec.

Le transfert de l’ambassade américaine point de non-retour

A revers du consensus international et de plusieurs décennies de diplomatie américaine Donald Trump a décidé – c’était une promesse de campagne – le 6 décembre 2017 de transférer l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem reconnaissant de fait la ville comme capitale d’Israël. Son inauguration le 14 mai dernier en présence de la fille du président Ivanka Trump et de son mari Jared Kushner a ravi les Israéliens autant qu’elle a ulcéré les Palestiniens. Depuis les relations avec le président palestinien Mahmoud Abbas ont été rompues.
En janvier dernier celui-ci mettait les choses au clair : « Nous disons à Trump que nous n’accepterons pas son plan l’affaire du siècle s’est transformée en claque du siècle. » Saëb Erekat haut responsable palestinien dénonçait pour sa part « un acte d’hostilité notoire contre le droit international et le peuple de Palestine plaçant les Etats-Unis du côté de la force occupante Israël ».
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou qui entretenait des relations glaciales avec Barack Obama n’en attendait pas tant. « Jérusalem restera la capitale d’Israël quel que soit l’accord de paix que vous imaginiez » déclarait-il ainsi en mai au moment d’inaugurer la nouvelle ambassade américaine.

Une politique pro-israélienne exacerbée

Les critiques palestiniennes à l’égard de Donald Trump remontent aux premiers jours de son mandat. Le 24 janvier 2017 soit quatre jours seulement après l’investiture du président américain la Maison-Blanche s’était refusée à tout commentaire après l’annonce par Israël de la construction de 2.500 logements dans des colonies en Cisjordanie. En septembre dernier c’est l’ambassadeur américain en Israël David Friedman qui évoquait la « prétendue occupation » israélienne provoquant l’ire des Palestiniens.
Début 2017 le porte-parole de la Maison-Blanche expliquait que le président Trump « [voulait] se rapprocher d’Israël ». Depuis il a reçu Benjamin Netanyahou à deux reprises affirmant notamment que « la solution à deux Etats » n’était pas la seule voie possible pour la paix. Le « dénigrement » d’Israël aux Nations unies est « terminé » affirmait également l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU Nikki Haley en mars 2017.
Depuis les Etats-Unis ont en effet multiplié les geste de bonne volonté vis-à-vis d’Israël et durcit le ton face aux Palestiniens :
•Début juin ils ont mis leur veto aux Nations unies à un projet de résolution au Conseil de sécurité appelant à protéger les Palestiniens ;
•Fin juin ils ont annoncé leur retrait du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU (CDH) qu’ils accusent de parti pris contre Israël ;
•Fin août « à la demande » de Donald Trump plus de 200 millions de dollars d’aide prévus pour des programmes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza ont été annulés ;
•Samedi Washington a ordonné la suppression d’une aide de 25 millions de dollars aux hôpitaux palestiniens à Jérusalem-Est ;
•Lundi les Etats-Unis ont annoncé la fermeture du bureau de la représentation palestinienne à Washington.

Un plan de paix « forcé »?

L’objectif non-dissimulé de la diplomatie américaine est de faire plier les dirigeants palestiniens. « Je dis ‘vous aurez l’argent mais nous ne vous paierons pas avant que nous ayons conclu un accord. Si nous ne concluons pas d’accord nous ne payons pas' » expliquait Donald Trump. « L’Organisation de libération de la Palestine (OLP) n’a pris aucune mesure pour permettre le début de négociations directes et significatives avec Israël » ajoutait la porte-parole du département d’Etat lundi.
Les responsables américains « pensent que les Palestiniens finiront par admettre qu’ils ont perdu et qu’ils doivent accepter ce qu’on leur propose peu importe les conditions peut-être en échange d’une autonomie limitée et de gestes économiques pour faire passer la pilule » explique à l’AFP l’ex-diplomate américaine Michele Dunne chercheuse au Carnegie Endowment for International Peace. Mais pour l’instant « nous avons compromis et même abandonné toute possibilité d’être ne serait-ce qu’un médiateur efficace » regrette Aaron David Miller chercheur du Wilson Center.
La semaine dernière Donald Trump a lui-même reconnu qu’il avait sous-estimé l’ampleur de la tâche : « Toute ma vie j’ai entendu que c’était l’accord le plus difficile qui soit à conclure et je commence à croire que c’est peut-être bien le cas. » Le plan de paix américain n’a pas encore été dévoilé mais que pourra-t-il changer? « L’issue la plus probable sera un ‘non’ des Palestiniens » estime Aaron David Miller. Ces dernières semaines Washington a proposé aux Palestiniens une confédération avec la Jordanie mais Mahmoud Abbas a refusé.
Michele Dunne suggère que c’est peut-être même l’objectif ultime de Washington : « Utiliser le refus inévitable des Palestiniens pour justifier de nouveaux changements dans la position américaine à l’égard de la présence israélienne en Cisjordanie ».


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