Ramallah – Centre Palestinien d’Information

Les camps palestiniens du nord de la Cisjordanie, en particulier Jénine, Naplouse et Tulkarem, sont le théâtre d’opérations militaires sioniste intensives qui suscitent des craintes croissantes quant aux efforts visant à réorganiser le paysage démographique et géographique de ces régions. Depuis 2022, les incursions militaires se sont intensifiées, incluant la démolition de maisons, la destruction d’infrastructures et le renforcement des restrictions sécuritaires, dans ce qui semble être une tentative de remodeler la réalité des camps palestiniens.
Dans le paysage général, les camps de Jénine, Nur Shams et Tulkarem sont soumis à une opération militaire baptisée « Le Mur de Fer » depuis le 21 janvier dernier, comprenant des incursions à grande échelle, l’utilisation de drones, de snipers et de bulldozers militaires, accompagnées de démolitions et d’incendies massifs de maisons et d’infrastructures.
Dans un développement notable, les forces d’occupation utilisent des bulldozers militaires massifs pour ouvrir de nouvelles rues à l’intérieur des camps, sous prétexte de faciliter l’entrée des forces armées. Cependant, de nombreux observateurs y voient une tentative de redessiner la carte interne des camps et de les transformer en zones plus faciles à contrôler sur le plan sécuritaire.
Le nombre total de Palestiniens déplacés de force à Jénine dépasse les 21 000 citoyens, avec 3 200 maisons évacuées sous la contrainte de l’occupation. Par ailleurs, 26 000 Palestiniens ont été déplacés des camps de Nur Shams et Tulkarem, et 639 opérations de démolition ou de destruction de maisons et de structures ont été menées.
De nombreux experts estiment que l’entité sioniste néonazie cherche à imposer de nouveaux faits sur le terrain dans les camps palestiniens, en détruisant les ruelles étroites utilisées comme passages sûrs par les combattants de la résistance palestinienne, et en les remplaçant par des rues plus larges permettant aux forces d’occupation de se déployer plus facilement. De plus, le ciblage des infrastructures, y compris les réseaux électriques et d’eau, vise à créer un environnement hostile pour les habitants, les poussant à migrer à l’intérieur du territoire, ce qui contribue à saper la structure des camps en tant que foyers communautaires de résistance.

L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés (UNRWA) affirme que l’agression sioniste dans le nord de la Cisjordanie depuis le 21 janvier dernier a entraîné le déplacement de 40 000 réfugiés palestiniens. Les opérations répétées et destructrices ont rendu les camps de réfugiés du nord inhabitables, conduisant à un déplacement cyclique des populations.
L’UNRWA confirme que « le déplacement forcé en Cisjordanie occupée est le résultat d’un environnement de plus en plus dangereux et coercitif. L’utilisation par les forces israéliennes de frappes aériennes, de bulldozers blindés, d’explosions contrôlées et d’armes sophistiquées est devenue courante, dans le prolongement de la guerre à Gaza. »
L’UNRWA décrit ce qui se passe comme un « nettoyage démographique lent », soulignant que la poursuite de ces opérations menace de vider la Cisjordanie de sa population palestinienne, tandis que les colonies sionistes s’étendent dans les zones dépeuplées.
Un objectif stratégique

Dans ce contexte, l’écrivain et analyste palestinien Yassin Azzedine affirme que l’occupation cherche à éliminer la résistance en utilisant des méthodes très dures, en essayant de reproduire les expériences des invasions de 2002 et de l’agression actuelle. Il souligne que ces opérations « ne sont pas seulement des cibles militaires, mais s’inscrivent dans un plan stratégique à long terme visant à démanteler les camps et à déplacer définitivement leurs habitants. »
Il ajoute qu’il existe une conviction sioniste selon laquelle les camps palestiniens sont un symbole de la persistance de la cause palestinienne, et qu’en les supprimant, ils seront oubliés. C’est pourquoi l’UNRWA a été ciblée et ses activités entravées.

Azzedine poursuit en disant : « Mais l’occupation ne se contente pas de détruire partiellement les camps et de démanteler leur structure démographique et géographique. Elle travaille à les rendre inhabitables, pour forcer les habitants à se déplacer. » Il estime que l’occupation cherche à remodeler la gestion de la vie quotidienne des Palestiniens en créant des structures parallèles à l’Autorité Palestinienne, lui donnant un contrôle direct sur la population.
Azzedine ajoute : « L’occupation ne cible pas seulement la résistance, mais veut épuiser chaque Palestinien, même le citoyen ordinaire qui n’a rien à voir avec la lutte armée. Les barrages militaires, les incursions dans les maisons, les arrestations arbitraires, les interrogatoires sur le terrain, sont tous des outils utilisés pour épuiser les Palestiniens et leur faire sentir qu’ils vivent sous une menace permanente. L’objectif est clair : pousser les gens à se soumettre ou à migrer. »
Il estime que cette politique s’inscrit dans ce qui se passe à Gaza, où l’occupation cherche à ancrer une nouvelle équation dans la conscience des Palestiniens, à savoir que la résistance signifie la destruction totale. « Ce qui se passe à Jénine et Tulkarem est un message à tous les Palestiniens que toute tentative de résistance sera confrontée à des opérations d’extermination massive, comme à Gaza. »
Un environnement économique hostile

La dimension militaire n’est pas la seule dans ce plan, selon Azzedine. À côté de cela, l’occupation travaille à créer un environnement économique hostile pour les Palestiniens, en restreignant les sources de revenus, en empêchant les investissements et en fermant les routes entre les villes et les villages, poussant les Palestiniens à n’avoir qu’un seul choix : la migration.
Alors que les camps subissent des campagnes de destruction systématique, les projets de colonisation s’accélèrent dans les zones « C », qui représentent 60 % de la superficie de la Cisjordanie.Ces actions sont devenu une pratique quotidienne, mais ladite « autorité palestinienne » ne fait qu’attaquer la résistance!!
Azzedine souligne que l’occupation a réalisé une grande partie de son plan pour expulser les Palestiniens de ces zones et les forcer à se diriger vers les centres urbains sous contrôle de l’Autorité Palestinienne, redessinant ainsi la carte démographique de la Cisjordanie.
Avec la poursuite de ces opérations, les craintes grandissent que les camps de Cisjordanie ne deviennent des « terres oubliées », où les habitants sont empêchés de retourner, tandis que la carte démographique et politique de la Cisjordanie est redessinée. Selon l’écrivain politique, l’occupation obtient des résultats à court terme, mais ne peut garantir leur durabilité.
Il note l’absence de tout horizon politique convaincant pour les citoyens, les poussant à abandonner la résistance. « La situation économique difficile peut pousser certains à se concentrer sur leur survie, mais en même temps, elle rend les gens plus prêts à résister, car ils n’ont plus rien à perdre. »
Il ajoute : « L’Autorité Palestinienne joue un rôle crucial dans ce plan, mais elle approche d’un moment de vérité, où sa légitimité est complètement épuisée, et elle est incapable de continuer à réprimer les Palestiniens avec sa main de fer sécuritaire. La résistance a besoin d’une position claire sur sa relation avec l’Autorité, pour ne pas faire partie de ce plan destructeur du tissu national palestinien. »
Azzedine insiste sur le fait que la Cisjordanie traverse l’une de ses phases les plus difficiles depuis des décennies, où les objectifs militaires et politiques s’entremêlent, et où le paysage palestinien est remodelé par la force. Mais la question demeure : L’entité sioniste réussira-t-elle à vider la Cisjordanie de ses habitants, ou les Palestiniens résisteront-ils comme ils l’ont toujours fait ?

Ces opérations ont suscité des réactions indignées de la part des Nations Unies et des organisations internationales de défense des droits de l’homme. Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a exprimé son inquiétude quant à « l’utilisation excessive de la force dans les zones civiles ».

Dans ce contexte, l’organisation Human Rights Watch confirme que l’entité sioniste utilise des tactiques de « punition collective », soulignant que les attaques contre les infrastructures dans les camps ne ciblent pas seulement les individus armés, mais affectent directement les civils, qui se retrouvent piégés dans des conditions de vie dégradées.
Préparer l’annexion

Le politicien palestinien des territoires occupés en 1948, Jamal Zahalka, affirme que les actions des autorités d’occupation ne peuvent être réduites à des considérations purement sécuritaires. « Elles ont des objectifs politiques déclarés, à savoir liquider la question des réfugiés et tenter d’éliminer la condition de réfugié, en démantelant et détruisant les camps, et en ciblant l’UNRWA, qui est liée au maintien de la question des réfugiés en vie. »
Il ajoute, dans un article publié par le Forum Palestinien le 27 février dernier, que ce qui se passe est une normalisation du déplacement après le 7 octobre, et surtout après les déclarations de Trump, où le déplacement est devenu un pilier central de la politique sioniste, passant de l’inconcevable à la table des décisions. Le déplacement de la Cisjordanie n’est plus une idée, mais une politique systématique et officielle, qui devrait susciter une inquiétude profonde en Jordanie et exiger une réponse arabe et palestinienne forte.
Au-delà des deux objectifs traditionnels des opérations militaires sionistes – affaiblir la résistance palestinienne et empêcher sa croissance, et brûler la conscience populaire quant à la capacité de la résistance à réaliser quelque chose pour le peuple palestinien – Zahalka estime que le gouvernement d’occupation prépare l’annexion. « L’appétit de la droite sioniste est ouvert à un accord avec Trump pour permettre à l’entité occupante de mettre en œuvre un projet d’annexion de la Cisjordanie ou de grandes parties de celle-ci. Certains sionistes croient que l’expansion de la présence militaire permanente conduira à une expansion de l’annexion. »
Il ajoute que le nord de la Cisjordanie est au cœur du projet d’expansion coloniale, où le ministre des Finances Smotrich affirme que la « détérioration sécuritaire » dans le nord de la Cisjordanie est due au « manque de colonies ». Il explique que l’opération militaire actuelle vise également à créer un environnement favorable à la colonisation autour de Jénine, Tulkarem, Tubas et d’autres zones.