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Les grands lacs de Gaza : une nouvelle crise en devenir

dimanche 30-mars-2008

A quelques mètres de plages sablonneuses et de gratte-ciel de villas de pierre blanche et de piscines couleur du ciel c’est l’exemple même de l’ironie et de l’injustice que plus d’1 million et demi de personnes soient obligées de boire de l’eau contaminée par les égouts. Lorsque la frontière entre la richesse et la pauvreté le privilège et le manque est aussi ténue il est extrêmement perturbant de réaliser qu’à un jet de pierres des mères et des pères doivent nourrir leurs familles avec du poison. Comme si l’occupant n’avait pas trouvé de manière plus créative pour torturer sa victime.

Le plus grand scandale c’est qu’une telle réalité est la politique voulue par le gouvernement israélien. Elle est décriée par les plus importants groupes de droits de l’homme du monde et pourtant elle est renforcée par Israël et honteusement soutenue et justifiée par les Etats-Unis. Il est incontestable que le désastre de l’eau contaminée dans la Bande de Gaza est une politique résolue du gouvernement israélien.

Le problème de la gestion des déchets à Gaza n’est pas nouveau et en fait il date de l’occupation israélienne directe de Gaza en 1967. A l’époque Israël a construit une usine de traitement des déchets qui fonctionne toujours aujourd’hui construite alors pour une population de 380.000 personnes chiffre qui est passé à 15 million.

L’appauvrissement de la ressource d’eau potable et la crise des ordures grandissante à Gaza conduit à des zones de débordement dont la plus importante appelée « le grand lac » occupe quelques 30 hectares de terre et représente environ 2 à 3 millions de m3 d’eau usée.

Avec des usines archaïques pour servir un groupe qui a presque triplé en nombre et avec le manque de produits de base tel le fuel pour faire fonctionner les pompes nécessaires au fonctionnement des usines le résultat est le déversement de déchets toxiques dans le sol et dans l’eau souterraine et même directement dans la mer.

IRIN l’organe des Nations Unies a récemment interviewé Rebhi al-Sheikh le directeur de l’Autorité palestinienne de l’eau (PWA) à Gaza qui évalue aujourd’hui à 75% le taux d’eau potable polluée à Gaza.

En janvier 2008 le rapporteur spécial du Conseil pour les Droits de l’Homme des Nations Unies John Dugard s’est rendu en Palestine et a constaté la situation qu’il a décrite comme « catastrophique » étant donné les restrictions imposées par Israël.

J’ai récemment discuté avec la doctoresse Suma Baroud sur les problèmes de santé qui résultaient de l’existence de zones comme le grand lac.

« En tant que praticien médical travaillant dans le secteur de soins de santé primaires dans la région de Khan Younis depuis 10 ans j’ai observé une myriade de maux et de problèmes massifs touchant la santé des habitants de Gaza en particulier les enfants résultant de lacs d’eaux usées en expansion comme le « grand lac » ou « majari » comme nous l’appelons.

« Beaucoup d’enfants sont soignés dans nos centres de santé pour des maladies dues à l’infestation de petits organismes comme les amibes. Ces maux progressent et débouchent sur des maladies internes qui affectent le petit ou le gros intestin et handicapent ou empêchent ses fonctions comme les coliques abdominales la diarrhée et la constipation. Parmi les autres complications je constate des anémies des problèmes de croissance et des désordres mentaux. De plus nous voyons un nombre de plus en plus important d’enfants qui souffrent d’insomnie ont peu d’amour-propre et manquent de confiance en eux-mêmes.

« Ajoutez à ceci un grand nombre de patients traités dans nos cliniques l’été pour des infections cutanées dues aux piqûres d’insectes. Nous avons un problème énorme avec ces insectes qui prolifèrent dans les conditions de vie que nous subissons avec la chaleur intense et les problèmes liés aux égouts et à l’eau.
Il y a une pression terrible sur le Ministère de la Santé à cause de la surconsommation de médicaments pour lutter contre ces maladies et leurs complications ultérieures. »

Un nombre incalculable de groupes pour les droits de l’homme ont mis la situation critique de Gaza au devant de la scène au cours des semaines récentes y compris le Comité International de la Croix Rouge qui a déclaré récemment à IRIN que « la situation environnementale à Gaza est très mauvaise et elle empire encore. »

30.000 à 50.000 m3 d’eaux usées partiellement traitées et 20.000 m3 de déchets non traités finissent dans les rivières et la Mer Méditerranée. Quelques 10.000 à 30.000 m3 de déchets partiellement traités finissent dans le sol et dans quelques cas ils atteignent la nappe phréatique polluant la déjà pauvre eau potable de Gaza.

Le Groupe International de Crise a récemment pressé Israël l’Egypte l’Autorité Palestinienne et le gouvernement Hamas de faire leur possible pour que les produits nécessaires soient disponibles tel le fuel qui est essentiel pour maîtriser l’énorme problème des eaux usées à Gaza.

Dans un article publié récemment dans « Coastal Post » publication basée en Californie le candidat aux présidentielles US Ralph Nader a fustigé Israël pour sa mise en œuvre multi-facettes de la violence institutionnalisée contre le peuple de Gaza et a appelé les USA à rendre des comptes pour leur totale complicité avec les pratiques inhumaines et illégales d’Israël : « Le siège d’Israël a aussi causé d’immenses pertes de vies humaines à Gaza à cause de l’effondrement des structures de santé les coupures d’électricité la malnutrition et la contamination de l’eau potable à cause du système public de l’eau anéanti. Les victimes sont pour la plupart des enfants et des civils qui meurent ignorés par l’Occident. 98% du Congrès US n’a aucune idée de la souffrance des habitants de Gaza congrès qui donnent des milliards de dollars des contribuables tous les ans à Israël. »

Selon l’Office de Secours et de Travaux des Nations Unies (UNRWA) « Gaza est en passe de devenir le premier territoire à être volontairement réduit à un état d’extrême misère en toute connaissance accord et – certains disent – encouragement de la communauté internationale. »

Au début mars de cette année un rapport rédigé par 8 groupes britanniques pour les droits de l’homme a condamné la politique d’Israël dans un rapport cinglant qui déclare que la crise humanitaire à Gaza est « la pire depuis 1967 ».

« Au moment où nous parlons les eaux usées se déversent littéralement dans les rues » dit Geoffrey Denis directeur de CARE International.

La directrice d’Amnesty International au Royaume Uni Kate Allen a dit qu’Israël se devait de protéger ses citoyens « mais en tant que puissance occupante à Gaza il a aussi le devoir légal de garantir que les Gazans aient accès à la nourriture à l’eau potable à l’électricité et aux soins médicaux. »

Elle ajoute : « Punir la population toute entière de Gaza en niant ses droits humains fondamentaux est absolument indéfendable. La situation actuelle est créée par l’homme et doit être renversée. »

Le rapport de 16 pages parrainé par Amnesty avec CARE International Royaume Uni CAFOD Christian Aid Médecins du Monde Royaume Uni Oxfam Save the Children Royaume Uni et Trocaire – appelle le gouvernement britannique « à exercer une pression plus importante sur Israël pour renverser sa politique de non négociation avec les dirigeants du Hamas à Gaza. »

Comme Kate Allen d’Amnesty le souligne on ne peut pas ne pas insister sur l’urgence de cette question. Un déversement tellement important que les gens le désignent comme « le grand lac » de tels sévices et mauvais traitements d’une population considérée comme « des personnes protégées » ne sont rien d’autres qu’un véritable scandale. La communauté internationale doit agir immédiatement pour assurer à Gaza la protection à laquelle elle a droit parce que comme le déclare Allen cette action odieuse est indéniablement provoquée par l’homme et doit être renversée immédiatement.  
 
  Source : Palestine Chronicle   
  Traduction : MR pour ISM 

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