La culture de la fraise et de la fleur coupée sont deux des secteurs agricoles les plus productifs dans la Bande de Gaza. Ils contribuent pour environ 25 millions de $US au produit national brut par habitant. De plus les deux secteurs emploient des milliers de personnes dans des emplois directs et indirects. La saison d’exportation pour les fraises dure du 20 novembre au 15 janvier et celle des fleurs coupées du 15 novembre au 25 avril.
Depuis le lancement du deuxième Intifada palestinien le 29 septembre 2000 ces deux secteurs agricoles ont rencontré des obstacles divers provoqués par les procédures imposées aux carrefours frontaliers en particulier à celui d’al-Mentar (Karni) seule sortie autorisée pour les exportations.
Le rapport publié par le PCHR (1) a pour but de mettre en lumière l’impact du siège actuel et de la fermeture des passages frontaliers sur les exportations de fraises et de fleurs coupées de la Bande de Gaza. Il examine l’impact de la fermeture sur la jouissance du peuple à ses droits économiques et sociaux en particulier le droit à jouir de conditions de vie adéquates et le droit au travail. Il couvre la période allant du 20 novembre 2007 jusqu’à la date de la publication (mars 2008) soit la période d’exportation des fraises et des fleurs coupées pour 2007-2008.
On espère que cette publication attirera l’attention de la communauté internationale sur les politiques et les pratiques de l’occupation israélienne contre près d’1 million et demi de personnes qui vivent dans une grande prison dans la Bande de Gaza en violation de la législation humanitaire internationale en particulier la 4ème Convention de Genève de 1945.
Contexte de la culture de la fraise et de la fleur coupée dans la Bande de Gaza
La superficie totale de la Bande de Gaza est de 365 km². Les terres agricoles représentent environ 8% de la superficie totale soit environ 30.000 dunams (1 dunam = 1.000 m²) cultivée essentiellement d’agrumes de légumes et de fruits. Depuis la création de l’Autorité Nationale Palestinienne (ANP) en 1994 de nouveaux secteurs agricoles ont été développés en raison de leur revenu élevé. Les fraises et les fleurs coupées en font partie.
La surface agricole totale pour ces deux secteurs est estimée à 2.700 dunams 2.200 pour les fraises et 500 pour les fleurs coupées. La culture de la fraise est concentrée dans la région de Beit Lahiya au nord de la Bande de Gaza et celle de la fleur coupée au sud de la Bande autour de Rafah et de Khan Younis.
Ces deux cultures nécessitent un traitement et des soins spéciaux qui augmentent relativement leurs coûts. Le coût d’un dunam de culture de la fraise est estimé à 3473 $US (soit un total d’environ 764 millions de $US pour ce secteur) et pour la culture de la fleur coupée environ 10 $US par dunam (soit environ 5 millions de $US).
En dépit de la surface relativement petite utilisée pour ces deux secteurs ils sont considérés comme deux types de culture qui bénéficient d’une haute valeur économique et sociale. Le revenu annuel des fraises est estimé à 10-12 millions de $US et le revenu annuel des fleurs coupées d’environ 13 millions de $US.
De plus ces deux secteurs contribuent à la création d’emplois. On compte environ 450 fermiers pour la culture de la fraise et 60 pour celle des fleurs coupées. On estime à 7.500 le nombre d’emplois indirects liés à la culture de la fraise (production commercialisation services etc.) et à 800 pour celle des fleurs coupées.
Jaber Qarmout ingénieur au Ministère palestinien de l’Agriculture a indiqué que les fraises et les fleurs coupées sont exportées selon un accord entre une compagnie israélienne et les fermiers de Gaza. Selon cet accord la compagnie israélienne achète les fraises et les fleurs coupées produites par les agriculteurs selon un cahier de charge qualitatif. Puis la compagnie exporte les produits vers l’Europe.
Il faut noter que la compagnie israélienne achète les fraises et les fleurs coupées produites par les agriculteurs de Gaza pour couvrir un déficit de la production israélienne dans ces deux secteurs et les exporte en Europe selon un accord avec l’Union Européenne (2). Les agriculteurs israéliens ne pouvant couvrir les quantités énoncées dans l’accord entre la compagnie israélienne et l’Union Européenne la compagnie a recours à l’achat des produits des agriculteurs de Gaza pour couvrir le montant requis. Le processus d’exportation selon l’accord passe par différentes phases :
– Inspection par le Ministère palestinien de l’Agriculture : les agriculteurs transportent leur production dans des stations spécifiques pour inspection. Les ingénieurs agricoles du Ministère inspectent les produits pour s’assurer de leur compatibilité avec le cahier des charges dont l’absence d’insecticides.
– Inspection par la compagnie israélienne : après l’inspection du Ministère la compagnie israélienne prend des échantillons des produits pour s’assurer de leur compatibilité. Le processus d’inspection prend 3 à 4 jours. Pendant cette période le produit est transporté jusqu’au passage d’al-Mentar (Karni). Si la compagnie israélienne découvre le moindre défaut le chargement est stoppé.
– Transport : lorsque le processus d’inspection est terminé les produits sont transportés d’al-Mentar à l’aéroport Ben Gourion où ils sont envoyés par avion cargo à leur destination d’exportation.
Notes de lecture :
(1) L’impact de la fermeture sur les exportations de fraises et de fleurs coupées de la Bande de Gaza PCHR.
(2) Il s’agit de l’Accord d’Association Union Européenne/Israël signé en 1995 mais qui n’est entré en vigueur qu’en juin 2000. Il garantit à Israël l’application de tarifs préférentiels sur les produits à l’exportation.
Pour l’Union européenne seuls les produits israéliens élaborés dans les frontières de l’état d’Israël (frontière d’avant 1967) peuvent bénéficier d’une exemption de droits de douanes. Or les douanes israéliennes accordent le traitement préférentiel aux produits émanant des territoires palestiniens donc a fortiori provenant des colonies israéliennes en territoire palestinien.
De plus l’accord d’association établit un lien entre commerce et politique (l’accord est fondé sur « le respect partagé des valeurs démocratiques et des droits de l’Homme »).
Deux raisons économique et politique qui devraient conduire à sa suspension voire à son abrogation. (ndt)
Sur la situation globale dramatique à Gaza lire le rapport très complet de Stephen Lendman : « Gaza assiégée : Le monde ne peut plus attendre. Les habitants de Gaza non plus. »
Source : Electronic Intifada
Traduction : MR pour ISM