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C’est l’existence même des Palestiniens qui fait peur

dimanche 8-avril-2018

La peur à l’égard de la population palestinienne autochtone a constamment façonné l’attitude du sionisme.
Comme il a été reproché aux Palestiniens de se trouver simplement sur la route du colonisateur leur enlèvement qui a entraîné des politiques multidimensionnelles de nettoyage ethnique et de génocide a été justifié sur le plan rhétorique par la transformation orientaliste des Palestiniens de propriétaires originels de la terre en terroristes «islamistes». Tandis que les Palestiniens sont confrontés à une multitude de formes de violence physique et structurelle les paroxysmes récurrents d’agressions israéliennes qui ont entraîné la production à grande échelle de morts palestiniens ont à maintes reprises mis en évidence la position déjà et toujours déshumanisée des Palestiniens dans la sphère publique et politique occidentale.
La Grande Marche du Retour protestation pacifique et populaire des réfugies palestiniens à Gaza révèle une fois de plus qu’Israël et ses alliés reprochent aux Palestiniens le simple fait d’exister. La protestation est la demande d’une population colonisée que le droit international soit appliqué. Les Gazaouis sont collectivement incarcérés assiégés sur terre dans les airs sur l’eau et depuis sept décennies on leur refuse le droit au retour – droit accordé par la Résolution 194 de l’ONU en 1948 – alors que dans le même temps ils sont confrontés à une catastrophe humanitaire terrible qui implique une pénurie de nourriture d’eau et d’électricité. Réduits à une existence des plus élémentaire Israël les bombardent régulièrement – comme lors de la guerre de 2014 – et teste de nouvelles armes sur leur corps.
Il n’était pas surprenant que cette fois encore l’armée moderne d’Israël ait immédiatement attaqué les manifestants. Les enregistrements audiovisuels partagés sur les réseaux sociaux par les Palestiniens montrent comment les tireurs d’élite israéliens ont tiré aveuglément sur quiconque s’approchait de la « barrière frontalière » d’Israël. Cette violence banale qui s’est traduite par le massacre des Palestiniens a été encouragée par le gouvernement israélien largement ignorée par les gouvernements occidentaux et légitimée par les médias occidentaux.
Les principaux organes d’information ont usé d’euphémismes tels que réponse passive pour parler de l’agression israélienne faisant appel linguistiquement à l’Orientalisme implicite des lecteurs et rationalisant le recours à l’agression militaire contre des manifestants pacifiques. Par exemple dans le Washington Post il était question d’ «affrontements meurtriers» (30 mars) et CNN rapporta que des Palestiniens furent «tués lors de confrontations avec les forces israéliennes » (31 mars).Selon un article du New York Times (30 mars) qui ne fait que paraphraser le discours israélien «les Israéliens ont réagi.» Le même article se conclut sur la justification rétrospective des trois guerres d’Israël contre Gaza comme étant le combat contre la menace que posent les tirs de roquettes par le Hamas et d’autres groupes militants et les tunnels qui passent sous la frontière.» Fox News a rendu le Hamas responsable des «attaques de Gaza.» La plupart des reportages comprenaient des photos de Palestiniens portant le Keffiah en train de jeter des pierres. Des photos et vidéos de soldats israéliens fortement armés ou de fusillades de civils palestiniens non armés – bien que omniprésentes sur les réseaux sociaux – en étaient absentes.
Cette fiction d’ «affrontements» et de «confrontations» projette la notion de conflit entre deux pays indépendants. Tout comme le gouvernement israélien les médias privent les Palestiniens de leur contexte historique et géopolitique insinuent qu’il existe une parité de puissance entre colonisateur et colonisés et laissent à penser que les Palestiniens meurent simplement parce qu’ils le doivent non parce qu’ils sont massacrés.
C’est aussi le discours israélien standard. Un message du ministère des affaires étrangères d’Israël envoyé aux diplomates israéliens met en évidence la tactique pure et simple du copier-coller que le gouvernement israélien utilise inlassablement pour justifier tout nouveau meurtre de Palestiniens : comme d’habitude la manifestation est diabolisée comme étant «dangereuse» «préméditée» et une «campagne de confrontation menée par le Hamas.» Tous les Palestiniens sont verbalement transformés en terroristes combattant pour le Hamas qui est qualifié d’organisation terroriste la plus dangereuse au monde capable de détruire Israël en un temps record. Ainsi toute violence contre les Palestiniens est de la légitime défense nécessaire. Parallèlement les Palestiniens sont rendus responsables de leur propre mort – comme en 2014 lorsque Naftali Bennett accusa le Hamas d’ «auto-génocide» palestinien.
Il s’ensuit que selon le récit derrière cette criminalisation généralisée de la dissidence palestinienne les Palestiniens ne protesteraient pas à cause de conditions d’existence insoutenables à cause de l’omniprésence de la mort ou parce qu’ils sont confrontés à une occupation militaire brutale – mais simplement parce qu’ils éprouvent une haine infondée. Ces hypothèses orientalistes laissent à penser que les Palestiniens n’ont pas de représentation.
L’Anti-Defamation League (ADL) a décrit les protestations comme «un appel à la fin de l’État d’Israël.» L’ADL a raison. Les revendications palestiniennes c’est à dire l’application du droit international la fin de l’occupation et l’octroi des droits de l’homme mèneraient très certainement à la disparition d’Israël dans sa forme actuelle. En effet les fondements d’Israël sont le colonialisme de peuplement l’occupation l’apartheid l’ethnocratie le nettoyage ethnique et des politiques génocidaires ce qui présuppose la perpétuation de la déshumanisation et de la racialisation islamophobe eurocentrique et orientaliste des Palestiniens que simultanément on ne peut connaître et qu’on imagine violents. Les Palestiniens sont considérés coupables de ne pas se rendre et d’attirer l’attention internationale sur leur lutte. Donc on leur reproche leur instinct de survie éminemment humain et de refuser d’accepter leur propre mort.
Les discours médiatiques révèlent que les Palestiniens sont perçus comme un fléau. Si le fait que l’armée israélienne tire sur un manifestant non armé est considéré comme un «affrontement» alors le danger que représentent les armes israéliennes est équivalent au danger que représente un Palestinien non armé. Donc les Palestiniens n’ont pas besoin de prendre d’armes afin d’être considérés comme dangereux. Leur existence même est comprise comme une attaque en soi et la visibilité de cette existence continue de hanter le projet colonial sioniste tandis qu’Israël continue d’essayer de faire disparaître les Palestiniens discursivement et physiquement.

Denijal Jegić est un doctorant en étudesaméricaines transnationales. Il a transmis cet article à The PalestineChronicle. Pour le suivre sur Twitter : @denijeg

3 avril 2018 – The Palestine Chronicle – Traduction: Chronique de Palestine – MJB

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