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J’ai été battu sauvagement sans en connaître la raison

dimanche 13-décembre-2009

Malgré les assurances répétées de l’Autorité Palestinienne (AP) que la torture a été interdite dans ses locaux d’interrogatoire et d’incarcération des histoires de sévices physiques et psychologiques continuent de faire surface en Cisjordanie. Cela soulève de sérieuses questions sur la crédibilité des engagements pris par l’Autorité Palestinienne devant les collectivités locales et les organisations internationales de défense des droits de l’homme opérant dans les territoires occupés.

Ce qui suit est la traduction fidèle du témoignage écrit de Kanaan Mustafa Said Shatat du village de Bidya dans le district de Salfit.

Shatat a relaté son histoire personnellement à l’auteur de ces lignes le mardi 8 décembre racontant les mauvais traitements terribles qui lui ont été infligés par des membres des services secrets palestiniens ou Mukhabarat le mois dernier.

Son récit cru souligne l’anarchie rampante qui empreigne tout l’appareil sécuritaire de l’AP. Il montre également la totale impuissance du gouvernement de l’AP à faire respecter ses propres lois par les diverses agences de sécurité qui opèrent pour son compte en Cisjordanie.

« Mon nom est Kanaan Mustafa Said Shatat du village de Bidya dans le district de Salfit. Le lundi 9 novembre alors que j’étais à l’intérieur de la pharmacie al-Noor vers 19h30 pour acheter des médicaments deux officiers du renseignement du Gouvernorat de Salfit sont entrés en trombe dans la pharmacie.

Ces deux officiers sont de Bidya : Mahmoud Mustafa Kanaa 40 ans marié et Sofyan Abdul Rahman Kamel al-Dalew 30 ans célibataire.

Une fois entrés en force dans la pharmacie ils m’ont sauvagement agressé m’ont donné des coups de poing sur tout le corps avant de me traîner dehors d’une manière violente et brutale. Là ils ont recommencé à me frapper sur le visage et la tête. Devant la pharmacie il y avait une patrouille de police dont les membres ont aidé les deux officiers à me mettre de force dans un véhicule bleu appartenant à la Mukhabarat. Les deux officiers m’ont emmené au poste de police de Bidya.

Là les policiers m’ont fouillé ont pris ma carte d’identité et m’ont mis dans une pièce seul. A ce moment là j’ai entendu la voix de mon père qui s’inquiétait de mon sort. Le chef de la police a dit à mon père que je n’étais pas là ce qui m’a forcé à crier pour dire à mon père qu’ils lui mentaient. Alors les policiers ont ouvert la porte et un d’entre eux m’a dit de me taire que j’étais un fauteur de trouble. Je lui ai dit que je n’en étais pas un et que je ne savais réellement pas pourquoi j’étais détenu en particulier puisqu’aucun mandat d’arrêt n’avait été lancé contre moi.

Le chef de la police m’a dit qu’une voiture de la Mukhabarat viendrait bientôt me chercher et que la police allait me remettre à la Mukhabarat à sa demande. Je lui ai demandé pourquoi ils allaient me remettre à la Mukhabarat. Il m’a répondu que c’était parce que la Mukhabarat voulait m’interroger sur certaines accusations.

Une demi-heure plus tard un groupe d’officiers de la Mukhabarat m’a emmené à leur centre local où on m’a mis dans une petite pièce à l’entrée de l’immeuble.

Peu de temps après pas moins d’une dizaine d’officiers du renseignement ont envahi la petite pièce se sont ligués contre moi et ont commencé à me passer à tabac. L’attaque a duré dix minutes et j’ai eu des coupures profondes au cuir chevelu une autre derrière l’oreille droite et je saignais de la tête et de la bouche. Les coups étaient si durs que je pouvais à peine tenir debout. Ensuite alors que je saignais toujours j’ai été emmené au bureau d’interrogatoire. Ils ont commencé à me questionner sur des accusations alléguant que j’avais menacé deux officiers du renseignement (Mahmoud Mustafa Kanaan et Hasan al-Akraa). Après que j’ai nié ces accusations ils m’ont demandé d’aller laver le sang.

En fait ils m’ont conduit au lavabo parce que j’étais trop faible pour marcher seul. Puis ils m’ont emmené dans une autre salle d’interrogatoire. Cependant comme ils ne pouvaient prouver les accusations portées contre moi le chef local de la Mukhabarat Muhammed Abdul Hamid (Abu Al-Abed) est entré dans la pièce accompagné de plusieurs officiers. Il m’a interrogé sur les accusations et je lui ai répondu que j’étais innocent. Alors le chef lui-même a commencé à me frapper alors que je saignais toujours et je n’avais rien pour arrêter le saignement à part un petit oreiller qui était trempé de sang.

Une heure plus tard ils m’ont emmené à la clinique de Bidya où on m’a posé des points de suture. Ils m’ont ramené au centre Mukhabarat et le chef m’a dit que je resterai en garde à vu indéfiniment. Le sixième jour de mon incarcération le 15 novembre 2009 ils m’ont demandé de remplir un questionnaire avec mon nom si j’étais marié ou célibataire mon affiliation politique et pour quel parti j’avais voté aux dernières élections. Ils m’ont aussi demandé pourquoi les Israéliens m’avaient arrêté en 2005. J’ai signé la déclaration sous serment avec ma dénégation des accusations.

Ensuite j’ai été emmené au bureau du procureur militaire de Salfit Yafi Marayta où on m’a demandé de donner mon nom mon affiliation politique et les accusations portées contre moi. Marayta m’a averti que s’il découvrait que les accusations étaient authentiques il me montrerait ce qu’il me ferait !

Puis il a prolongé ma détention de 15 jours. Alors qu’on me conduisait au bureau du procureur militaire j’ai entendu un officier du renseignement nommé Zayd dire au procureur militaire : « Je t’emmène un détenu Hamas qui était en garde à vue chez nous. Il est têtu apprends-lui les bonnes manières ! » Marayta lui a dit : « T’inquiète pas. »

J’ai été ensuite emmené au centre de la police de Salfit où je suis restée incarcéré pendant 11 jours de plus jusqu’à ce que je sois libéré sous caution le 26 novembre.

Je suis un civil et totalement innocent des accusations portées contre moi. En fait l’appareil de la Mukhabarat ne s’est pas contenté de me tabasser de m’humilier et de me torturer mais ils ont aussi contacté mon employeur la Compagnie Palestinienne des Télécommunications demandant qu’on me vire de mon poste apparemment pour m’appauvrir moi et ma famille. Heureusement que la compagnie n’a pas cédé à leur tactique d’intimidation. Je ne sais vraiment pas ce qui va m’arriver ensuite au sujet des accusations contre moi et aussi pour mon travail.

Signature : Kanaan Shatat.

P.S. « A partir de mon enlèvement dans la pharmacie Noor le 9 novembre jusqu’à mon transfert dans les quartiers de la police de Salfit les officiers de la Mukhabarat qui m’accompagnaient n’ont cessé de m’injurier et de m’insulter. Ces gens-là insultent injurient Dieu et la religion et se livrent à toutes sortes de blasphèmes comme ils respirent. »

 
Source : Middle East Online
Traduction : MR pour ISM

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