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Abbas allait-il préparer en Jordanie une nouvelle capitulation ?

samedi 13-avril-2013

L’ex-président palestinien Mahmoud Abbas nous a pris de court lorsqu’il s’est rendu par avion en Jordanie pour signer un accord stipulant que le roi de Jordanie Abdallah II était le gardien des lieux saints dans Jérusalem occupée et avait le droit de mettre en œuvre tous les efforts juridiques pour les protéger en particulier la mosquée d’Al-Aqsa.

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Abbas n’est plus président de rien du tout depuis plus de 3 ans et Abdallah est le dernier rejeton d’une dynastie de pacotille jadis mise en place par les occupants britanniques

Quand nous disons qu’il nous a surpris nous entendons que cet accord qui a été signé dans une pièce close et en présence des deux dirigeants et de quelques proches collaborateurs n’a pas été annoncé à l’avance ni expliqué et les parlements jordanien et palestinien n’ont pas été informés de son contenu .

La seule remarque d’Abbas au sujet de cet accord a été de dire que c’était une consolidation de ce qui existe déjà. Ce sont de belles paroles. Si c’est le cas alors pourquoi signer cet « accord historique » qui survient dans la foulée d’une visite secrète du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à Amman et un autre visite – celle-là publique du président américain Barack Obama ?

Cet accord n’était certainement pas le résultat d’une initiative hâtive et il est presque certain que des comités juridiques et politiques l’ont préparé ces dernières semaines et peut-être depuis des mois et dans le secret le plus total.

Ces questions doivent être posées : pourquoi recourir au secret et pourquoi n’y a-t-il pas de transparence afin que les peuples des deux pays puissent comprendre ce qui est proposé en particulier dans une affaire d’une telle gravité.

L’objection n’est pas ici à propos de la tutelle hachémite sur les lieux saints ou du droit du roi de Jordanie à déployer tous les efforts juridiques pour les protéger mais sur le principe de voir l’ex-président Abbas dont le mandat a pris fin depuis plus de trois ans signer des accords de façon unilatérale au nom du peuple palestinien – dans la patrie et dans la diaspora – sans se référer à une institution légitime du peuple palestinien sans consultation de ses partenaires ni de qui que ce soit d’impliqué dans la lutte.
Nous parlons ici des organisations de la révolution palestinienne à commencer par le « Hamas » et le Jihad islamique en terminant par les Fronts populaires et démocratiques (FPLP FDLP).

Cet accord historique sur la tutelle des lieux saints peut créer un précédent. Nous craignons qu’Abbas ne signe d’autres accords avec Israël prenant par surprise le peuple palestinien de la même manière. Il peut unilatéralement faire des concessions très graves au profit des Israéliens.

Ce qui nous rend soucieux e nous met en garde contre contre ce type d’initiative c’est que des « négociations de paix » entre le gouvernement Netanyahu et l’Autorité palestinienne de Ramallah sont imminentes et qu’ il est question dans les couloirs de Washington de Ramallah et Jérusalem occupée de nouvelles idées américaines que le secrétaire d’État américaine John Kerry apporterait au cours de sa prochaine visite dans la région.

Il y a plusieurs explications à cet accord et à la façon dont il a été concocté si rapidement et d’une manière qui a stupéfié beaucoup de monde du côté jordanien comme palestinien :

La première : la position de plus en plus faible du président palestinien Mahmoud Abbas et son désir d’exporter cette crise en Jordanie et vers son roi.

La seconde : cet accord est une étape importante et préparatoire à une fédération entre la Cisjordanie et la Jordanie sous le prétexte de faire de la Palestine un état sur le papier conformément à la recommandation de l’Assemblée générale des Nations Unies il y a trois mois.

La troisième : La présence d’un plan américano-israélien pour limiter la question de Jérusalem occupée à la question des lieux saints et en particulier à Al-Aqsa et exiger que les Palestiniens perdent leur souveraineté sur d’autres territoires et quartiers qui tomberont alors sous « annexion » israélienne.

Nous n’avons pas d’informations sur la nature de la « cuisine » qui se prépare à l’heure actuelle dans des pièces fermées entre des chefs arabes israéliens et américains. Mais il est de notre droit de craindre une conspiration après avoir vu la façon dont l’administration américaine a fabriqué des raisons pour envahir l’Irak et comment la France a fabriqué les siennes pour une intervention de l’OTAN en Libye. Pourquoi une conspiration ne se répéterait-elle pas en Palestine ? D’autant plus que le chef de cuisine dans ce nouveau complot est Tony Blair l’envoyé international soit-disant pour la paix et un des plus grands fabricants de mensonges pour justifier l’invasion de l’Irak ?

S’il y a une volonté sincère d’établir une confédération entre la Jordanie et la Palestine nous pouvons être d’accord à condition que les territoires palestiniens soient libérés en premier avec Jérusalem occupée comme premier d’entre eux et qu’un État palestinien soit établi avec une souveraineté absolue et totale sur ses territoires. Et puis surtout cette confédération doit être approuvée par les peuples jordanien et palestinien lors d’un référendum général et en totale transparente.

Abbas n’est pas autorisé par le peuple palestinien à signer des accords en son nom sans avoir obtenu son approbation et celle de ses institutions. Il n’est pas non plus autorisé à entamer de nouvelles négociations avec les Israéliens dans le but de parvenir à un accord sans l’autorisation absolue du peuple palestinien et de ses institutions élues – la plus éminente étant le Conseil législatif palestinien – et sans la participation de toutes les organisations et les élus de la société civile palestinienne.

Nous sommes surpris par le silence des autres organisations palestiniennes sur la signature d’accords par Abbas sans en référer à qui de droit.

Nous sommes particulièrement surpris par le silence du mouvement Hamas et des ses dirigeants qui n’ont apparemment rien à dire à ce sujet à moins que leur silence ne soit un signe d’acceptation.

Le peuple palestinien recherche l’unité et sa cause est de la responsabilité de tous les Arabes et de tous les musulmans tout comme la libération de leurs lieux saints de l’occupation israélienne. Mais il nous faut encore et toujours rappeler que Al-Aqsa est sous occupation israélienne et que son retour sous souveraineté arabe et islamique n’a pas besoin d’accords historiques. Libérons d’abord ces territoires et leurs lieux saints et alors personne ne sera opposé à une tutelle hachémite.

Notre problème ou plutôt notre malheur réside dans le fait que l’Autorité palestinienne ne veut pas prendre de mesures sérieuses pour faire pression sur les Israéliens et qu’au contraire elle empêche le peuple palestinien de lancer une intifada qui permettrait de ramener la question du conflit israélo-palestinien de l’occupation et de son injustice en tête de l’ordre du jour arabe et islamique et international.

Abbas ne devrait pas aller vers l’est s’il veut s’activer mais à l’ouest… pour lutter contre l’occupation et rendre celle-ci très coûteuse pour les occupants. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes à l’ère du printemps arabe et des révolutions contre les dictatures qui persécutent et qui méprisent leurs peuples parlent en leur nom et le cas échéant décident de tout sans aucune considération ou de respect pour eux.

* Abdel Bari Atwan est palestinien et rédacteur en chef du quotidien al-Quds al-Arabi grand quotidien en langue arabe édité à Londres. Abdel Bari Atwan est considéré comme l’un des analystes les plus pertinents de toute la presse arabe.

3 avril 2013 – Abdel Bari Atwan – Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.bariatwan.com/english/?p=1535
Traduction : Info-Palestine.eu – al-Mukhtar

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