Tue 2-July-2024

Faut-il parler avec le Hamas?

mardi 20-mai-2008

La France a donc pris contact avec le Hamas.

 Bernard Kouchner a confirmé ce matin les révélations du « Figaro » selon lesquelles un important diplomate français à la retraite a ouvert un canal de discussions avec l’organisation islamiste considérée comme une entité terroriste par l’Union Européenne et qui gouverne seule la bande de Gaza depuis bientôt un an.

 L’initiative prudente va dans le sens de ceux de plus en plus nombreux (y compris en Israël) qui considèrent qu’il est temps de parler avec le Hamas.

 Pourquoi est-ce nécessaire? Pourquoi faut-il sortir du satu quo actuel?

 Dans un rapport très complet le « Center for European Reform » un think tank basé à Londres donne trois séries de raisons:

 1/ La politique d’isolement du Hamas a échoué.

  Elle devait provoquer l’effondrement du pouvoir islamiste à Gaza par une asphyxie économique mais un an après il est toujours là et bien là.

Elle était censée contraindre l’organisation à changer de position vis à vis d’Israël (qu’elle ne reconnaît pas) mais cela ne s’est pas fait.

Elle a favorisé les plus radicaux au sein du Hamas et comble du comble a renforcé grandement la position de l’Iran en Palestine (qui fournit argent et fort probablement armes au mouvement).

Il est donc temps d’en changer.

D’autant 2/ que le président de l’Autorité palestinienne se retrouve plus affaibli que jamais après la tournée de Bush dans la région qui marque la fin du processus mort-né d’Annapolis.

La perspective de la création d’un Etat palestinien en Cisjordanie s’éloignant il ne reste plus beaucoup de crédibilité à Mahmoud Abbas auprès des siens.

Pour éviter une déstabilisation totale de la Palestine il faut donc travailler à la réconciliation des frères ennemis le Hamas et le Fatah.

 3/ Une opération militaire israélienne visant à déloger le Hamas de la bande de Gaza semble vouée à l’échec.

Les difficultés de Tsahal face au Hezbollah montrent que les alliés de l’Iran disposent aujourd’hui de moyens suffisants pour repousser les militaires israéliens.

Et même si Israël parvenait à écraser militairement le Hamas on ne voit pas quelle configuration politique stable pourrait émerger de l’après-conflit.

Le « Center for European Reform » propose donc que l’Europe passe un accord avec le mouvement islamiste radical et cela sans attendre que celui-ci reconnaisse Israël (puisque dit le CER on a commencé à parler avec l’OLP avant qu’Arafat n’accepte officiellement l’existence de l’Etat hébreu).

 Il s’agirait de lever les sanctions économiques européennes qui pèsent sur Gaza en échange de l’arrêt des attaques du Hamas contre Israël.

Le but serait de favoriser les modérés et de transformer le Hamas en acteur du processus de paix.

Est-ce là l’idée de Bernard Kouchner?

 Il ne l’a pas dit.

 Quoi qu’il en soit l’initiative française est risquée:

 – La communauté juive de France qui a dans une large mesure soutenu Nicolas Sarkozy pendant la campagne électorale va voir d’un mauvais oeil cette ouverture vers une organisation islamiste qui ne reconnaît pas Israël.

– Bernard Kouchner a déjà essuyé un échec avec un autre allié de l’Iran le Hezbollah qui en dépit de l’invitation à la Conférence de Paris a bloqué l’élection du président de la République au Liban.

– Plus généralement la reconnaissance de fait du Hamas peut être interprétée comme une prime donnée par la France à l’usage de la force.

 Mais y a-t-il une autre solution?

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