Rapport du département général des relations et de l’information au Ministère palestinien des prisonniers
Les anciens prisonniers palestiniens entre la dureté de la prison l’amertume de l’attente et l’espoir de la libération
« Celui qui vit une expérience d’emprisonnement sait combien elle est longue et dure mais il sait aussi qu’il n’y a pas de place au désespoir ».
« Lorsque je témoigne aujourd’hui après ces 27 ans de prison je vois une situation complète avec deux faces : un état de sauvagerie de sadisme et de répression représentée par le geôlier et un autre état représenté par le prisonnier palestinien qui a réussi à maintenir son existence en tant qu’être humain à préserver son identité en tant que combattant et qui fait face à des conditions en les transformant en une véritable école révolutionnaire.
Cette longue période ne m’a pas épuisé bien que la fatigue soit une donnée humaine il est probable que j’affiche de la fierté en niant cela mais la fatigue est relative car si je suis fatigué de la prison cela ne signifie pas que je suis fatigué de porter ma cause et ma conviction qui m’ont mené en prison j’ai encore l’énergie pour continuer. Nous en tant que peuple nous n’avons pas beaucoup de choix la question est d’être ou ne pas être ou bien nous poursuivons avec le même état d’esprit ou bien nous tombons et nous finissons en tant qu’êtres humains et en tant que cause ».
C’est par ces paroles que Saïd Wajih Atabeh le plus ancien prisonnier palestinien a commencé ses paroles après 27 ans et 8 mois de prison alors qu’il est encore en prison. Mais il reste l’espoir de la liberté cette énergie par laquelle ces prisonniers ceux qui sont enfermés depuis des dizaines d’années continuent le chemin de la souffrance. Ils ont passé leur jeunesse derrière les barreaux. Certains ont embrassé pour la première fois leurs enfants en prison même comme le prisonnier Fakhri al-Barghouty qui a été réuni avec ses deux fils dans la prison de Ascalan pour les embrasser pour la première fois depuis son arrestation il y a 27 ans.
Les chiffres
Le département de l’information du ministère palestinien des prisonniers précise dans son rapport que la dénomination d’anciens prisonniers concerne ceux qui ont été arrêtés avant les accords d’Oslo en 1994 et qui sont toujours en prison. Ils sont environ 400 prisonniers sur les 8300 prisonniers actuels. 25 prisonniers d’entre eux ont passé plus de 25 ans de prison ils sont :
Saïd Atabeh de Naplouse arrêté depuis le 29 juillet 1977 Na’il Salih Barghouty de Ramallah arrêté depuis le 4 avril 1978 Fakhry Asfour Barghouty de Ramallah arrêté le 23 juin 1978 Akram Abdel Aziz Saïd Mansour de Qalqylia arrêté depuis 2 août 1979. Tous sont à la prison de Ascalan et le prisonnier arabe le plus ancien prisonnier libanais Samir Qintar du Liban arrêté le 22 avril 1979 qui se trouve à la prison de Haddarim.
Le rapport indique que 13 prisonniers ont passé plus de 20 ans en prison et moins de 25 ans : il s’agit des prisonniers Muhammad Ibrahim Mahmoud Abu Ali de Yata – al-KHalil arrêté depuis le 21 août 1980 le prisonnier Fouad Qasim Arafat Razem d’al-Quds arrêté depuis le 30 janvier 1981 le prisonnier Ibrahim Fadl Nimr Jaber d’al-Khalil arrêté depuis le 8 janvier 1982 le prisonnier Hassan Ali Nimr Salma de Ramallah arrêté depuis le 8 août 1982 le prisonnier Uthman Ali Hamdane Muslih de Naplouse arrêté depuis le 15 octobre 1982 le prisonnier Sami Khaled Salame Younes de Ara (Palestine occupée en 48) arrêté depuis le 5 janvier 1983 le prisonnier Karim Yousef Fadl Younes de ‘Ara également arrêté le 6 janvier 1983 le prisonnier Maher Abdel Latif Abdel Qader Younes de ‘Ara arrêté le 20 janvier 1983 le prisonnier Hafedh Nimr Muhammad Qandas de Yafa (Palestine occupée en 48) arrêté le 15 mai 1984 le prisonnier Issa Nirml Jibril Abd Rabboh du camp de Dhayshe arrêté depuis le 21 octobre 1984 le prisonnier Muhammad Abdel Rahim Mansour de Tulkarm arrêté le 27 janvier 1985 le prisonnier Ahmad Farid Muhammad Shahade du camp de Qalandia arrêté le 16 février 1985.
Le rapport mentionne aussi que 125 prisonniers ont passé entre 15 et 20 ans de prison et 291 ont passé entre 10 et 15 ans de prison.
Selon le rapport les anciens prisonniers suivent avec crainte les informations dans les médias concernant la libération des prisonniers et surtout ceux qu’Israël décrit comme ayant les mains entâchées de sang Israël les ayant déjà exclus des libérations lors des accords d’Oslo en 1994 ainsi que lors d’autres libérations. Actuellement les critères posés par Israël pour la libération des prisonniers sont les mêmes ne voulant pas prendre en compte les demandes palestiniennes relatives à la nécessité de libérer les anciens prisonniers. Aucun nom d’ancien prisonnier ou de ceux qui ont de lourdes peines ne se trouve dans la liste préparée par le gouvernement israélien dans le cadre des « bonnes intentions » qu’il a affirmé.
Les prisonniers affirment que les nouvelles qui leur parviennent par les médias sur les rencontres des comités ministérielles pour définir les nouveaux critères pour la libération des prisonniers suscitent un peu d’espoir sur la possibilité qu’ils soient libérés. Ils ont affirmé que toute mesure d’accalmie ne peut réussir que si les prisonniers sont libérés sans conditions et selon un agenda précis mis au point par les deux parties. Ils ont demandé à la direction palestinienne de ne signer aucun accord avec la partie israélienne qui ne compte pas la libération des prisonniers palestiniens et notamment les plus anciens ne laissant pas la porte ouverte aux « bonnes intentions » israéliennes.
Le rapport ajoute qu’au moment où le gouvernement israélien se targue fièrement de ne pas accepter la libération de prisonniers palestiniens ayant les mains entâchées de sang le tribunal militaire israélien de la région nord a condamné un soldat israélien ayant tué un Palestinien à quatre mois de prison seulement. Le soldat avait tiré un coup de feu sur la voiture palestinienne tuant son conducteur le martyr Nabil Ahmad Jaradat qui habitait Sila al-Harthiyeh il y a un an et demi.
Le gouvernement militaire a dénoncé le soldat d’avoir conduit à la mort par négligence et pour avoir donné de fausses informations et d’avoir agi de manière incorrecte. Il a été condamné à 4 mois de prison. Cette condamnation est l’une des plus dures qui a été prononcée contre des soldats ayant commis des crimes au cours de l’intifada al-Aqsa. Le sang israélien serait-il plus pur que le sang palestinien se demande le rapport ? Les assassins de Iman al-Hams à Rafah qu’un soldat a assassiné de sang froid en tirant plus de 20 balles a été remis en liberté car il croyait que le cartable qu’elle portait sur le dos contenait un explosif.
Une situation difficile
Le rapport indique que la situation des anciens prisonniers n’est pas différente de celle des prisonniers de manière générale aucune considération n’est prise pour leur âge avancé pour le nombre d’années qu’ils ont passé en prison. Une vague de répression s’étend sur eux pour casser leur moral et leur volonté. Le prisonnier Issa Abd Rabboh du camp Dhayshé prisonnier depuis 1984 condamné à la perpétuité et ancien représentant des prisonniers à Nafha affirme que la situation des anciens prisonniers est très dure la direction de la prison ne cesse de les provoquer en menant des campagnes de fouilles surprise dans les cellules en pleine nuit en confiscant leurs objets personnels en coupant l’électricité et la direction de la prison provoque sciemment les prisonniers en cognant sur les cellules en pleine nuit pour les déranger et les empêcher de se reposer tranquillement.
La direction de la prison entreprend régulièrement des transferts d’une prison à l’autre d’une section à l’autre pour susciter chez eux une situation d’instabilité et de souffrance morale et psychologique afin de les empêcher d’agir mais aussi pour augmenter la souffrance des parents qui viennent leur rendre visite. Les prisonniers dont l’argent de la cantine arrive à leur compte sont transférés afin de créer une situation troublée et la direction utilise de plus en plus fréquemment la politique de l’isolement pour de longues périodes dans le but de démolir le moral des prisonniers.
Le prisonnier Abd Rabboh ajoute que la direction de la prison a interdit la prière de groupe lors de la promenade ne leur permettant que de faire la prière de vendredi. Elle leur impose des amendes pour la moindre des futilités. Des prisonniers ont été isolés parce qu’il y avait dans les cellules une corde que les prisonniers utilisent pour faire des exercices physiques les prisonniers ont été punis par le paiement des amendes et la direction a fait courir le bruit que les prisonniers tentaient de s’enfuir.
De plus des milliers de prisonniers sont interdits de visite pour des raisons sécuritaires et sont soumis à des fouilles humiliantes comme les fouilles à nu.
Des prisonniers âgés et des malades
Etant donné que la plupart des anciens prisonniers sont âgés et le nombre d’années passées en prison plusieurs d’entre eux souffrent de diverses maladies. Etant donné également les conditions de détention et surtout au cours des années 90 et 80 lorsque les prisons n’étaient pas très différentes des tombes les prisonniers ont besoin de soins. Le prisonnier Muhammad Abu Ali Mashhour de Yata a passé 25 ans de souffrance après avoir fini les interrogatoires avec -50% de possibilité de la vue il a subi jusqu’à présent 5 interventions chirurgicales à l’oeil. L’état de santé de Abu Ali s’est détériorée ces temps-ci ce qui a obligé la direction de la prison à le transférer à l’hôpital de Soroka où il a eu une crise cardiaque. Plusieurs associations de droits de l’homme réclament sa libération immédiate à cause de son état de santé. Mais les autorités de l’occupation refusent.
La question des anciens prisonniers et surtout ceux qu’Israël décrit comme ayant les mains entâchées de sang est devenue le critère pour savoir si Israël est sérieux dans sa manière de traiter l’accalmie et le cessez-le-feu. La rue palestinienne et les organisations ne refusent pas moins que la libération des prisonniers dans le cadre d’un agenda précis qui commence par la libération des anciens prisonniers les prisonniers âgés les enfants et les femmes afin de démontrer le sérieux du processus politique dans la région.
De son côté le ministre palestinien des prisonniers Sufyan Abu Zayda a déclaré que la partie palestinienne refuse de traiter avec les conditions et les critères israéliens concernant la libération des prisonniers et des détenus affirmant que la position palestinienne est claire dans son refus des critères israéliens Israël devant traiter sérieusement ce dossier car il est devenu un critère de confiance pour les Palestiniens dans les déclarations israéliennes.
Le ministre a ajouté que la partie palestinienne tient à ses critères qui comprennent la libération des anciens prisonniers avant 94 sans distinction entre organsiations ni les peines et la libération de tous les enfants ainsi que les malades et les femmes.