Ce jour 15 mai 2012 marque le 64e anniversaire d’Al Nakba la Catastrophe palestinienne de 1948. Chaque année le 15 mai les Palestiniens rappellent la calamité qui s’est abattue sur eux afin que l’État d’Israël voie le jour. D’environ 800 000 Palestiniens au départ qui dans la peur ont dû fuir leurs foyers ce nombre aujourd’hui est à multiplier par dix. Plus de cinq millions de réfugiés palestiniens enregistrés vivent dans des camps en Palestine et dans les pays arabes voisins. Et chaque année ils se souviennent de leurs foyers de leurs terres et de leurs vies perdus qu’ils sont toujours impatients de retrouver.
Al Nakba est très forte en émotions pour tous les Palestiniens parce qu’elle incarne les grandes injustices qui ont été perpétrées contre eux et l’échec à les réparer. Cette année les émotions sont encore plus fortes. Non seulement elle marque une année supplémentaire de manques et d’attentes mais c’est une année où 2000 de nos enfants meurent de faim derrière les barreaux israéliens exigeant leur liberté et leur dignité avec la seule arme qu’ils possèdent : les ventres vides.
Les réfugiés ou leurs descendants qui gardent toujours précieusement les clés de leurs maisons perdues et les prisonniers prêts à l’ultime sacrifice pour leur pays en sont arrivés au point de faire honte à toutes et tous.
Notre cause n’a rien à voir avec des sièges de pouvoir des titres ou des portefeuilles ministériels ; ce n’est pas pour se faire prendre en photos ou avoir des discussions préliminaires ou pour aller à la Maison-Blanche. Notre cause concerne une nation un pays perdu une cause qui mérite toujours grâce au dévouement et à la passion de son peuple qu’on se batte pour elle.
En ces moments éprouvants notre peuple a plus que jamais besoin d’unité. Aussi difficile que cela puisse paraître nous devons nous obliger à prendre Israël pour exemple. La semaine dernière Benjamin Netanyahu nous a appris à quel point il faut être judicieux en politique. Dans une initiative surprise qui nous a tous sidérés il s’est associé avec son opposition le parti Kadima pour former un gouvernement de large coalition nationale et a évité ainsi des élections anticipées qui auraient pu lui coûter son poste. Peu importe que le Kadima et le Likoud s’y retrouvent comme chiens et chats se traitant les uns les autres de tous les noms et se lançant de tous côtés des accusations blessantes. Pour l’avenir d’Israël (et la peau de Netanyahu en prime) toutes les divergences ont été effacées et la coalition est née.
Les Palestiniens ont tant à apprendre. Non seulement la réconciliation entre Hamas et Fatah nous échappe encore et toujours mais le « remaniement ministériel limité » pour reprendre les termes des officiels de l’Autorité palestinienne reste encore à faire. Ils se chamaillent se disputent ils laissent leur avidité prendre le meilleur d’eux-mêmes alors que le vrai combat pour la Palestine il se trouve dans cette lutte courageuse menée dans les cellules froides et obscures des prisons de l’occupation israélienne il se trouve dans les cœurs déterminés des réfugiés de Palestine.
Les prisonniers ont réussi là où leurs dirigeants ont échoué. Ils se sont unis dans leur lutte contre leur oppresseur et ils continuent de se battre côte à côte indépendamment de leur affiliation politique. Si seulement nos dirigeants pouvaient faire de même. Qu’importe le parti qui obtient tel ou tel ministère – ils sont tous sans importance aux yeux de l’occupation israélienne de toute façon. Alors qu’excuses et accusations se prolongent sans fin la Palestine est perdante chaque jour qui passe. Un coup d’œil sur les colonies qui s’étendent fébrilement dans toute la Cisjordanie et à Jérusalem prouve combien c’est vrai.
Aujourd’hui nous somme à une croisée des chemins. Les prisonniers qui ne visent rien de moins que l’aboutissement de leurs justes revendications nous ont appris une précieuse leçon avec leur détermination et leur passion. De même que la photo qui montre un homme de 95 ans brandissant la clé de sa maison dans la Palestine d’avant 1948 et qu’il a perdue nous rappelle à toutes et à tous que c’est une cause qui mérite qu’on se batte pour elle parce qu’il est question de dignité de patrie et d’un peuple qui ne capitulera pas.
Oui cet anniversaire de la Nakba est très fort en émotions pour tous les Palestiniens mais c’est aussi une sonnette d’alarme.
Tout n’est pas perdu comme le pensent bien des observateurs palestiniens sceptiques de la scène politique. Il y en a tant parmi nous – les prisonniers et toutes celles et ceux qui sont dans les rues chaque jour en solidarité avec eux et les réfugiés qui quand vous leur demandez d’où ils viennent vous donnent le nom de leur village d’origine – il y en a tant qui toujours gardent la Palestine tout entière au fond de leur cœur et de leur tête. C’est notre chance pour surmonter cet état de fait ridicule et pour voir notre lutte pour ce qu’elle est : simple et pure c’est la lutte pour la Palestine.
* Joharah Baker est écrivain au Media and Information Department at the Initiative for the Promotion of Global Dialogue and Democracy (MIFTAH). Elle peut être contactée à [email protected].
14 mai 2012 – MIFTAH – Traduction : Info-Palestine.net/JPP