Fri 5-July-2024

Le captif Ahmed Zaid est une copie réduite d’un monde indéfinissable et sans fin de la détention administrative

jeudi 8-février-2007

Ramallah – CPI

A la fin du mois de juin dernier Ahmed Zaid détenu dans la prison du désert de « Al-Naqab » essayait de maîtriser ses appréhensions. Après deux ans d’une détention dite administrative la date de la libération devait arriver dans peu du temps.  

Ces craintes s’avèrent qu’elles n’étaient pas non fondées. Quelques heures avant le moment prévu pour sa libération il reçoit une nouvelle décision pour une nouvelle prolongation de six mois de sa détention. Il prend son mal en patience et dit :     « Je remercie Allah le Tout Puissant pour toute chose. Toute force ne vient que d’Allah ».  

Néanmoins il ne peut oublier son petit qui n’a que six ans. Il se rappelle du jour de son précédent renouvellement le quatrième ; son petit garçon lui avait dit :     « Ô papa ! Apparemment le jour du jugement arrivera et tu seras encore dans la prison ! ».  

Toutefois ce sentiment d’enfermement éternel habite l’esprit de tous les captifs palestiniens administratifs dont 550 d’entre eux sont enfermés dans la prison du désert de « Al-Naqab ». La chaleur les brûle en été ; et le froid hivernal les abîme. Ils deviennent de plus en plus vulnérables face à la maladie à la douleur et surtout face à toutes sortes de supplices pratiquées contre eux par l’administration pénitentiaire sioniste !  

Arrestation pour une duré illimitée

Le cas du captif Ahmed Mustapha Shahada Zaid 36 ans originaire de la ville de Ramallah peut résumer les angoisses d’une attente interminable des captifs palestiniens. En effet c’est pour la sixième fois que sa période de détention a été reconduite depuis son arrestation du 07 juillet 2003. A l’époque il travaillait comme moniteur dans une auto-école. Il donnait aussi des cours à la faculté de « Abou Djihad » ouverte pour les captifs et les libérés.  

Les jours passent dans la prison et notre captif Ahmed Zaid ne comprend toujours pas pourquoi il est-là et quelle est la nature de son chef accusation. Il ne fait que constater en disant :     « Nous dans (la détention) administrative vivons une incarcération sans limite. Nous devons toujours penser et envisager les décisions de reconduites répétitives. Aucun parti n’ouvre le dossier des captifs administratifs de façon sérieuse bien que les captifs condamnés (par les tribunaux) ne vivent pas les mêmes souffrances que les nôtres. Ils savent au moins qu’il y aura une date où ils quitteront la prison pour sortir à la vie libre. Tandis que nous nous n’avons que la mort lente qui nous attend ».  

Om Mohammed l’épouse du captif Ahmed Zaid dit de son côté :     « Au premier jour de son arrestation il a été transféré au centre d’interrogation de Beit Iyl pour y être informé de la décision de détention administrative pour une période de six mois ».  

Depuis lors la famille endure une grande souffrance chaque fois que les six mois approchent de sa fin. En effet aux derniers moments l’administration pénitentiaire sioniste les choque par une nouvelle prolongation. Une nouvelle reconduite de six mois sans cause apparente. Mêmes les avocats ne peuvent jeter un œil à leurs dossiers sous prétexte du « secret ». Ces avocats dans chaque session de la cour d’appel n’ont pour toute réponse que quelques mots prononcés par le juge sioniste : « Vous êtes un activiste du Hamas ». Et c’est tout !  

Des douleurs encore plus dures

Les souffrances de ces captifs palestiniens « administratifs » qui laissent derrière eux des enfants souvent en bas âges sont naturellement encore plus dures. Ahmed Zaid a trois enfants. L’aîné est Mohammed un garçon de treize ans seulement. Momin le cadet est un garçon de onze ans. Le benjamin Monis n’a que sept ans. Leur mère avec un ton amer dit :  

 « C’était un choc terrible pour nous tous sa dernière reconduite. Dernièrement je commence à sentir que l’affaire commence à faire ses effets négatifs sur le moral des petits à un point que le tout petit Monis commence à croire que son père ne quittera jamais la prison et qu’il va passer toute sa vie dans la maison sans père ! ».  

L’état psychologique des petits se détériore de plus en plus constate leur mère. Le tout petit ne mange qu’à peine un repas par jour. « Si j’essaie de le convaincre il crache tout ce qu’il a mangé poursuit-elle avec amertume. Ils deviennent quasiment muets. Notamment pour l’affaire de leur père ils essayent toujours de ne pas en parler. Ils n’expriment pas ce qu’ils pensent dans leur for intérieur… ».  

La mère sent que les enfants ont un grand souhait de croire que leur père quittera un jour la prison. Cependant la réalité de la chose ne l’encourage guère.  

Quant au père du fin fond de son cachot il dit :  

  « Ce qui est le plus douloureux pour moi c’est l’idée de la réaction de mes enfants de mon épouse et de ma mère. A propos de ma mère je suis privé de la voir depuis mon arrestation. Les autorités de l’occupation sioniste refusent de lui permettre de visiter son fils bien qu’elle ait d’un état de santé critique. Je sens une chaîne supplémentaire lorsque je pense que mon tout petit garçon est entré à la maternelle qu’il entre à l’école et puis finit le CP sans que je le vois même pas une fois ».  

Le prolongement la visite et la maladie

Chaque fois que Zaid essaye d’assembler les fils d’un espoir d’une possible libération le souci est qu’il sait que les fils sont si fins qu’il ne peut tricoter un véritable espoir. 

Les conditions de vie à l’intérieur des prisons sont très mauvaises et très difficiles à supporter. Le captif Zaid dit :   « En plus du problème de la conduite (de l’enfermement) on peut parler de la visite avec toutes ses souffrances et douleurs. Il y a aussi le problème de dizaines de captifs palestiniens malades. La maladie chez eux débute souvent avec de tous petits problèmes. Elle s’aggrave petit à petit. C’est le cas de beaucoup d’entre eux. A titre d’exemple le captif Shokri Al-Khawaja a perdu progressivement la vue. Il est actuellement menacé d’une cécité totale. Le cas du captif Raïd Abou Romaila est un autre exemple. Il a été atteint aux yeux sans recevoir aucun soin utile ».  

Le captif lui-même souffre d’une migraine chronique qu’il avait eu avant son arrestation. Sa femme parle de cette migraine :  « L’affaire était quasi banale. Les médecins n’ont pas trouvé une raison valable pour cette migraine. Cependant après son interpellation l’histoire a pris une autre tournure. La crise commence à se répéter plus souvent et de façon plus dure. L’administration de la prison n’essaye jamais de l’aider de le soigner dans aucun cas sinon de lui donner qu’un calmant à chaque visite médicale ».  

La visite : un rendez-vous avec les larmes

 « Autant nous avons envie de voir nos familles et nos enfants autant nous voulons leur éviter la peine d’un terrible voyage dit Ahmed Zaid ».  

En effet le jour d’une visite à leur père les enfants de Zaid ainsi que leur mère doivent se réveiller avant l’aube pour qu’ils puissent arriver à la prison de « Al-Naqab » plusieurs heures après midi.  

A l’arrivée les enfants se heurtent à une réalité très amère. Tout d’abord la famille doit attendre devant la fenêtre ou plutôt la grille en ferraille renforcée par une couche à peine translucide.  

Le petit Mounis perd patience et commence à crier : « Ô mon père Ahmed Zaid de la ville de Ramallah ». Les larmes de tous les présents crient avec lui.  

Après toutes ces peines données la visite ne dure qu’une demi-heure. Les trois enfants ne croient pas leurs yeux de ce qu’ils voient. Ces trop courtes minutes ne suffisent point lorsqu’ils trouvent leurs langues et commencent à décrire à leur père leur amour infini à parler de leurs très bonnes notes à l’école.  

Pour voir leur père de haut en bas continue l’épouse du captif Ahmed Zaid racontant la scène d’une trop courte retrouvaille les enfants demandent à leur père de s’éloigner un peu juste un peu suffisamment pour le voir de façon complète.  

« Non ce n’est pas tout le monde qui sort ! »  

Ahmed Zaid dit Abou Mohammed décrit son amertume du fait que les enfants ne peuvent pas comprendre qu’il soit toujours enfermé :   « Je leur dis qu’il n’y a aucune libération et que beaucoup de captifs palestiniens vivent des conditions pires que les miennes. Mais leur pensée ne peut que se focaliser dans une seule direction : tout un chacun entre dans la prison devra la quitter un jour. Malheureusement nous les détenus administratifs notre date de sortie est indéfinissable… ».  

A la dernière visite son petit garçon Mounis lui avait dit :     « Tout le monde sort. Et toi papa… ? ».

Le père n’avait que cela à lui dire :    « Non ce n’est pas tout le monde qui sort. Ici il y en a beaucoup comme moi. Il faut attendre un soulagement de la part d’Allah le Tout Puissant ! ».    « Je sens le cœur crevé prisé dit ce père de trois enfants en bas âge lorsque je vois sur le petit écran les enfants du monde entier faisant la fête avec leurs pères et leurs familles tandis que nous nous sommes jetés sans aucun chef d’accusation dans un endroit désertique. Loin très loin de tous ceux que nous aimons.  » Nous vivons des temps très dur vraiment notamment par exemple lorsque la nouvelle de la mort de ton père arrive ; c’est très douloureux. Il y en a beaucoup qui peuvent venir d’une extrémité du monde pour faire leurs adieux à leur père malade. Et moi je suis ici non loin et je ne peux jeter le dernier regard sur mon père. Ce n’est pas tout… ».  

Le captif Ahmed Zaid (Abou Mohammed) sent qu’il laisse derrière lui une vie en suspense. Des enfants qui grandissent sans lui loin de leur père. Une femme qui perd patience pour voir son mari. Une mère à qui son absence aggrave sa maladie. Un travail qui ne peut attendre pour l’éternité. Tous les aspects de sa vie à l’extérieur sont en suspense en attente d’un jour qui s’entête à venir.  

Un captif palestinien enfermé par le système sioniste de détention administrative avec rien de sûr pour lui excepté la mort qui reste toujours un rendez-vous sûr. Qu’il l’attende puisque les autorités de l’occupation sioniste ne veulent rien lui proposer d’autre !

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