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Hébron au cœur de loccupation

jeudi 15-mars-2018

Une famille palestinienne expulsée de sa maison par les soldats de Tsahal un enfant palestinien agressé par des colons des détritus et bouteilles d’urine jetés en notre direction… entre provocation harcèlement checkpoint et racisme ordinaire le quotidien des Palestiniens d’Hébron semble incarner l’occupation sioniste et l’oppression du peuple palestinien.

Hébron entre colonisation et massacre

La ville d’Hébron située à 31 km de Jérusalem est considérée comme une ville sainte par les trois religions monothéistes. Outre la religion chrétienne elle accueille le caveau des Patriarches – où sont enterrés Abraham sa femme Sarah leur fils Isaac et sa femme Rifka Jacob Joseph – mais aussi la mosquée Ibrahim – emblématique pour les musulmans.
Hébron est aussi connue comme étant la capitale économique de Palestine et une des plus riches cités du pays : elle procurerait à elle seule 70% des revenus du gouvernement palestinien.
Après la guerre des Six jours en 1967 la communauté juive sioniste s’implante de plus en plus durablement dans la ville d’Hébron et ses alentours défendue par son gouvernement. Soutenue par Menahem Begin (1977 – 1983) la colonie de Qiryat Arba est pionnière dans ce processus suivie en 1984 par celle de Tel Rumeida. Aujourd’hui on compte quatre colonies israéliennes dans le centre de la ville : Avraham Avinu Beit Romano Beit Hadassah et Tel Rumeida.
L’événement qui signe réellement la fin d’une époque pour les Palestiniens d’Hébron se déroule le 25 février 1994 : il s’agit du massacre de la mosquée d’Abraham. En plein mois de Ramadan au cours de la prière du vendredi un attentat vise les Palestiniens musulmans. Baruch Goldstein colon né sur le sol américain entre dans la mosquée et ouvre le feu sur les fidèles. 29 Palestiniens sont tués 100 autres sont blessés. Rapidement le meurtrier est abattu à son tour. Immédiatement l’armée israélienne ferme la mosquée laissant les morts et les blessés à l’intérieur sans aucun secours. Choqués les Palestiniens réagissent avec fureur. Des émeutes soulèvent la ville. Pourtant au lieu d’imaginer protéger les Palestiniens de la région le gouvernement israélien les punit. « Nous avons été punis d’avoir été victimes d’un massacre. » témoignent-ils toujours aujourd’hui.
Ainsi sous prétexte de vouloir empêcher toutes représailles Israël impose aux Palestiniens un couvre-feu de 30 jours et ferme la mosquée. Ce n’est que dix mois plus tard que la mosquée rouvre ses portes. Les Palestiniens découvrent avec surprise qu’ils n’ont plus accès qu’à 35% de leur Lieu saint. Que sont devenus les 65% restants ? Cette partie majoritaire intégrant désormais le tombeau d’Abraham est transformée en synagogue. En sus de nouvelles règles voient le jour : obligation est faite aux Palestiniens de traverser plusieurs checkpoints pour accéder à leur mosquée et interdiction d’accès à celle-ci aux musulmans lors des fêtes religieuses juives.
Les conséquences du massacre ne s’arrêtent pas là : la rue Shuhada est clôturée. Longue de presque 2 km elle était connue comme étant la rue principale d’Hébron. Elle connectait le Sud et le Nord de la ville. Marché de fruits et de légumes nourriture station de bus station essence… Tous les commerces se trouvaient dans cette rue artère principale pour les courses de quelque nature soient-elles. Celle-ci était véritablement le cœur d’Hébron. Connue pour la qualité de ses produits elle attirait des Palestiniens de toutes cités : Haïfa Jaffa Jérusalem Ramallah Tulkarem Bethléem Qalqilya Gaza… Après le massacre commis par le sioniste Goldstein le poumon économique de la ville est mis à mort. La seule justification donnée au peuple palestinien par Israël est la suivante : « Nous avons peur que les Palestiniens décident de se venger ». Dès lors tous les Palestiniens qui tenaient boutique dans la rue sont dans l’interdiction de commercer. De même les habitants doivent s’en aller. 1 800 commerces ferment spontanément leurs portes et 520 sont fermés autoritairement par les militaires israéliens. La menace de six mois de prison est faite aux propriétaires susceptibles de décider de braver l’interdiction d’ouverture. Le lieu meurt : 1 800 commerces fermés 1 800 familles palestiniennes sans revenus. Pire chaque commerce employant trois ou quatre personnes c’est près de 8 000 familles d’Hébron qui se trouvent en difficulté. Le centre d’Hébron devient ville fantôme.

Une vie quotidienne sous occupation israélienne

L’ensemble du territoire palestinien est divisé en zones A B C. Mais la ville d’Hébron dispose d’un statut différent : jusqu’en 1997 l’intégralité de la ville est sous contrôle militaire israélien. A cette date l’OLP et Israël signent le protocole d’Hébron divisant la ville en deux zones : H1 sous le contrôle de l’Autorité palestinienne et H2 sous le contrôle des militaires israéliens. Les habitants d’H2 perdent à cette occasion leurs droits les plus élémentaires.
En effet Hébron est la seule ville palestinienne (Jérusalem mise à part) où colons et Palestiniens cohabitent au quotidien. Au sein de la ville : 400 colons israéliens et 1 500 soldats de Tsahal engagés pour veiller à leur sécurité. Forcément les tensions sont exacerbées.
Les soldats se relayent de manière à veiller à la protection de chaque colon ce en permanence. Etonnamment les colons possèdent aussi une arme laquelle est portée bien en évidence. Aucune autorisation ne leur est demandée alors qu’un Palestinien porteur d’un simple couteau est immédiatement arrêté qualifié de terroriste voire tué.
Plus étonnant encore l’installation des colons est encouragée – payée – par le gouvernement. Ces colons reçoivent chaque jour des fruits et des légumes apportés directement chez eux. Ils ne travaillent pas n’ouvrent pas de commerces. En effet pour les Israéliens très religieux travailler serait une insulte à Yahvé. Vêtements décoration objets en tous genres : le souhait est à peine exprimé que le gouvernement le réalise si pas ils pensent que Dieu y pourvoira. Le colon n’a pas de rôle à prendre dans la société il n’a juste que deux missions : persécuter les palestiniens pour les forcer à partir et avoir autant d’enfants que possible afin d’augmenter la population israélienne. C’est l’exemple d’Anat Cohen qui a 16 enfants. Connue pour être une des Israéliennes d’Hébron la plus fanatique et la plus violente cette habitante de la ville a plusieurs fois fait le tour des réseaux sociaux au travers de vidéos où tant verbalement que physiquement elle agresse Palestiniens ou touristes internationaux. Il faut savoir que le gouvernement israélien alloue mensuellement à chaque famille de colons 1 000 shekels par enfant soit environ 240 euros. Cet état de fait ulcère les Palestiniens : cette invasion et cette multiplication au sein d’Hébron par une nouvelle population non impliquée dans le développement économique ou culturel de la ville une population irrespectueuse envers les Palestiniens une population simplement animée d’un esprit de conquête et de provocation.
Les colonies disposent de tours d’observation gardées par des soldats armés et payés pour passer la journée à surveiller la vie des Palestiniens. Ils vident les maisons et les espaces publics pour créer des terrains de jeux et de sports pour les enfants des colons. Les marchés deviennent des terrains de basket où les colons passent leur journée. À certaines familles palestiniennes des sommes exorbitantes sont proposées afin qu’elles quittent leur maison… toutes refusent même les plus pauvres. Là est leur voie de résistance. Mais cela ne ralentit pas Israël : certaines familles sont expulsées de chez elles par la force.
Quand les colons souhaitent sortir de leurs quartiers d’Hébron ils peuvent demander aux soldats de les accompagner pour les protéger. Les Palestiniens nomment leurs excursions « les tours de provocation » car ceux-ci sortent pour provoquer et attaquer les Palestiniens. Il devient alors dangereux pour ces derniers de quitter leur maison ne serait-ce que pour aller travailler. Racisme insultes harcèlement… Tout semble fait pour effrayer la population locale et l’inciter à quitter définitivement Hébron.
Dans la vieille ville d’Hébron des grillages ont été posés au-dessus de nos têtes. Mon guide m’explique qu’ils servent à protéger les Palestiniens des colons qui vivent juste au-dessus. De leurs fenêtres ceux-ci balancent toutes sortes de déchets lesquels atterrissent sur les grilles « de protection » (emballages vides débris de verre restes de nourriture œufs urine…).
Les soldats assistent aux scènes à ce qu’elles représentent comme humiliations quotidiennes insupportables mais n’interviennent pas pour autant en faveur des Palestiniens. Tout est permis aux colons israéliens. « Nous ne sommes pas là pour protéger les Palestiniens. Nous sommes là pour protéger notre peuple : les colons » prétextent les soldats. Les commerces sont détruits les arbres les oliviers sont arrachés sans réaction de la part de ces derniers.
Les zones à proximité des colonies israéliennes ou de la rue Shuhada sont des lieux très dangereux pour les Palestiniens et nombre d’entre eux y ont été tués au cours des dernières années.
Ainsi la vieille ville occupée d’Hébron subit désormais un régime d’apartheid. La discrimination l’occupation le racisme les violations des droits de l’Homme sont la règle. La violence et les humiliations sont quotidiennes. Les expulsions sont courantes. Les arrestations sous des prétextes fallacieux se multiplient. La ville tente de résister désormais à un régime de terreur imposé par la force d’occupation sioniste.
Des organisations comme Human Right Defenders TIPH Yeshdin Human Rights[2] dénoncent les abus et violences à Hébron. Selon Yeshdin Human Rights Organisation plus de 90% des plaintes déposées par les Cisjordaniens à l’encontre des colons sont déboutées sans aucune explication.

Youth Against Settlements

Le mouvement “Youth Against Settlements” est un groupe activiste non-violent qui vise à mettre fin à la construction à l’expansion des colonies israéliennes illégales par des luttes populaires et des résistances civiles non violentes. Basé à Hébron dans l’une des zones les plus touchées par l’occupation israélienne et où des fanatiques israéliens s’octroient tous les droits ce mouvement participe à l’éducation et à la sensibilisation des jeunes Palestiniens pour les encourager à résister de manière pacifique les sensibiliser à l’importance de la communication pour dénoncer l’occupation quotidienne et surtout les convaincre de ne pas céder en abandonnant la ville… et ce sans céder à la violence.

https://blogs.mediapart.fr

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