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Braver les balles dIsraël depuis un an

mardi 2-avril-2019

29.03.2019 – Atia Younis 67 ans participe régulièrement chaque vendredi aux manifestations de la Grande Marche du Retour à Gaza depuis leur lancement le 30 mars 2018. Il n’en a manqué qu’une c’était en juillet 2018 après avoir respiré du gaz lacrymogène pulvérisé par les forces israéliennes. L’exposition à cette arme chimique l’a rendu malade pendant une semaine au cours de laquelle il a souffert de spasmes musculaires.
Ce fut une expérience effrayante.
Younis avait amené avec lui 14 de ses petits-fils dans une tente érigée à environ 500 mètres de la barrière séparant Gaza et Israël. Ils chantaient des chansons patriotiques et jouaient au jeu de voir qui connait le plus de noms de lieux palestiniens lorsque l’armée israélienne a commencé à tirer dans leur direction.
« Mes petits-fils se sont mis à crier et à courir » dit Younis qui vit à Rafah la ville la plus au sud de Gaza.
Au milieu de la panique Younis a quitté la tente pour essayer de localiser ses petits-fils. Au début il n’a pu en trouver que quatre.
« Je me sentais impuissant tout le monde fuyait la fumée et il y avait une grande confusion. J’ai continué à appeler mes petits-fils. Je priais Dieu de ne en perdre aucun. »
Il lui a fallu 30 minutes avant d’arriver à voir à travers l’épais brouillard blanc des gaz lacrymogènes. Heureusement tous ses petits-fils étaient sains et saufs.
« Pendant un moment je me suis demandé si j’avais tort d’emmener les enfants [aux manifestations] » a déclaré Younis. Après mûre réflexion il est parvenu à la conclusion qu’il n’avait pas cherché à les mettre en danger.
Comme la plupart des habitants de Gaza Younis est un réfugié. Sa famille est originaire de Barbara un village de Palestine historique qui a été nettoyé ethniquement par l’armée israélienne au cours des derniers mois de 1948.
Les manifestations hebdomadaires affirment le droit des réfugiés palestiniens à revenir dans les villes et les villages d’où ils ont été expulsés eux et leurs proches. Ce droit a été reconnu par les Nations Unies.
Younis raconte que la marche s’est poursuivie malgré la violence extrême d’Israël preuve de son efficacité. « Mais Gaza a toujours besoin du soutien de la Cisjordanie et des pays arabes » a-t-il déclaré.

Lire pour ses droits
Mustafa al-Zatma un autre résident de Rafah âgé de 28 ans est ingénieur dans le secteur privé. « J’ai un bon travail ici et je voudrais travailler dans une société d’ingénierie internationale » a-t-il déclaré. « J’aime ma vie mais cela ne m’empêche pas de participer à la marche comme tout mon peuple pour exiger le droit de retour. »
Sa famille est originaire du village d’Al-Majdal dont les troupes israéliennes se sont emparé en novembre 1948. La ville israélienne d’Ashkelon a été construite sur les vestiges du village.
Au cours d’une des manifestations hebdomadaires al-Zatma s’est associé à plusieurs de ses amis pour organiser une chaîne de lecture. Cela consistait à rester assis en cercle et à ouvrir des livres à environ 700 mètres de la clôture.
« Cet événement était un message au monde entier que les gens qui participent à la Grande Marche du Retour sont des personnes éduquées conscientes des droits des Palestiniens » a-t-il déclaré.
La distance de la clôture et le fait que l’activité soit clairement pacifique n’ont pas empêché Israël de tirer des gaz lacrymogènes en direction des lecteurs.
Insistant sur le fait qu’il est « totalement » avec la marche al-Zatma pense néanmoins que les organisateurs des manifestations devraient empêcher les enfants de participer. « Les enfants sont largement ciblés par les tireurs d’élite israéliens » a-t-il déclaré.
Près de 200 Palestiniens ont été tués lors des manifestations hebdomadaires depuis leur lancement à la fin du mois de mars 2018. Plus de 40 d’entre eux étaient des enfants.

« J’ai vu Azzam tomber »
Iyad Barbakh douze ans n’est pas d’accord avec la suggestion selon laquelle les enfants ne devraient pas être autorisés à participer.
« Si on m’empêchait de participer à la marche je trouverais un moyen de le faire » a-t-il déclaré. « Je vais à la marche pour réclamer les mêmes droits que n’importe quel autre enfant au monde. »
La pire chose qui soit arrivée à Iyad au cours de la dernière année est de loin lorsque son ami Azzam Oweida blessé par les balles d’un tireur d’élite israélien est mort peu après.
« J’ai vu Azzam tomber au sol le visage en sang » dit Iyad. « Je n’oublierai jamais. »
Iyad lui-même a été blessé deux fois lors des manifestations. La première fois il a été touché par une grenade lacrymogène et il a dû être soigné pour des brûlures. La deuxième fois en février dernier il a été blessé par balle au bras et à la jambe. Il a continué à participer aux manifestations malgré ces blessures.

Témoigner
Deux femmes et une jeune fille ont été tuées lors des manifestations hebdomadaires.
Malina al-Hindy participe aux manifestations avec son mari et ses enfants.
« Les femmes ont toujours été aux côtés des hommes dans tous les domaines de la résistance palestinienne » a-t-elle déclaré. « C’est notre devoir de participer à la marche. »
Al-Hindy (photo ci-dessous) a payé le prix de sa bravoure. Elle a été blessée à trois reprises par des grenades lacrymogènes et à deux reprises à balles réelles lors d’une manifestation au cours de l’année écoulée.
Un meurtre qui a retenu l’attention de la communauté internationale est celui de Razan al-Najjar. Secouriste bénévole elle a été abattue par un tireur d’élite israélien en juin 2018 alors qu’elle s’occupait de manifestants blessés.
L’assassinat montre combien les personnels de santé travaillent dans des conditions extrêmes.
Alaa al-Ajramy 34 ans fait partie de ces secouristes qui ont eu beaucoup de travail pendant chacune des manifestations hebdomadaires. Il a admis qu’il ressentait une grande tension pendant ses huit heures de travail du vendredi.
« Je n’ai pas peur de la mort ni de ne plus revoir mes quatre enfants » a-t-il déclaré. « Mais je ne peux pas m’imaginer être à la place de l’un de ces jeunes qui ont perdu l’usage d’un bras ou d’une jambe. »
Le ministère de la Santé de Gaza a déclaré qu’il y a eu plus de 100 amputations à la suite de blessures infligées aux manifestants. Environ 25 des personnes amputées sont étaient des enfants.
L’expérience la plus déchirante dont Al-Ajramy a été témoin fut l’assassinat de son collègue Mousa Jaber Abu Hassanein en mai 2018.
« Mon ami s’est vidé de son sang pendant 15 minutes » dit Al-Ajramy. « Et pendant ce temps nous n’avons pas pu nous approcher de lui à cause des tirs nourris autour de lui. Nous n’avons pu intervenir pour sauver sa vie. »
Les journalistes aussi sont en danger lors des manifestations. Deux ont été tués alors qu’ils couvraient les manifestations. Leur mort n’a pas dissuadé leurs collègues de raconter toute l’étendue de la cruauté d’Israël. La seule protection accordée à un journaliste est que l’agence de presse pour laquelle il travaille publie ses reportages vidéo sans le nommer.
Le journaliste a expliqué que son pire jour fut celui où Israël a massacré environ 60 manifestants l’année dernière le 14 mai.
Il travaillait à l’est de Gaza lorsque les troupes israéliennes ont ouvert le feu.
« Soudain tout le monde autour de moi s’est mis à tomber par terre » dit-il. « Certains avaient reçu une balle dans la tête d’autres au bras ou à la jambe. C’était très dur. J’ai allumé ma caméra et rampé parmi la foule. »
Admiré par ses collègues pour son courage le journaliste s’est aventuré à moins de 100 mètres de la clôture. « Je me rapproche de la clôture pour pouvoir me rapprocher des manifestants » a-t-il déclaré. « J’essaie de documenter les crimes d’Israël contre ces personnes. »

Source : The Electronic Intifada
Traduction : MR pour ISM

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