Dimanche 29 mars dix semaines après avoir donné son témoignage à B’Tselem Ghada Abu Halima est morte dans un hôpital égyptien des suites des blessures subies lorsqu’elle a été brûlée au phosphore blanc.
Voici son témoignage :
« Jusqu’à la semaine dernière je vivais avec mon mari Muhammad 24 ans et nos deux filles Farah 3 ans et Aya 6 mois dans le quartier A-Sifa de Beit Lahiya. Nous vivions dans la même maison que les parents de Muhammad Sa’dallah Abu Halima 44 ans et Sabah Abu Halima 44 ans and ses frères et sœurs : ‘Omar 18 ans Yusef 16 ans ‘Abd a-Rahim 13 ans Zeid 11 ans Hamzah 10 ans ‘Ali 4 ans et le bébé Shahd 1 an.
Notre maison avait deux étages. Au premier étage il y avait 250 m² d’entrepôts et nous vivions au deuxième étage. Nous sommes fermiers et notre terre est près de la maison.
Dans la nuit de samedi [3 janvier] les avions israéliens ont jeté des tracts appelant les habitants du secteur à quitter les maisons. L’armée avait fait pareil lors d’incursions précédentes et nous n’avions pas quitté la maison ; de même cette fois nous avons décidé de ne pas partir.
Le lendemain [4 janvier] vers 16h alors que toute la famille était dans la maison l’armée a commencé à bombarder notre secteur. Quelques minutes après les missiles sont tombés sur notre maison ils ont déclenché un incendie et plusieurs membres de la famille sont morts brûlés : mon beau-père sa petite fille Shahd et trois de ses fils : ‘Abd a-Rahim Zeid et Hamzah.
Ma belle-mère et ses fils Yusef ‘Omar et ‘Ali ont été brûlés. L’incendie s’est propagé dans toute la maison. J’avais ma fille Farah dans les bras et nous avons été brûlées toutes les deux. Mes vêtements ont pris feu et une partie de ma peau et de celle de Farah ont été brûlées. Heureusement ma petite Aya n’a pas été blessée. J’ai arraché mes vêtements et j’ai crié que j’étais en train de brûler. J’étais nue devant tout le monde dans la maison. Mon corps brûlait et la douleur était atroce. Je sentais l’odeur de ma chair en train de brûler. C’était affreux. J’ai cherché quelque chose pour me couvrir j’ai crié sans arrêt. Le frère de mon mari a enlevé ses pantalons et m’a couverte avec. La haut de mon corps est resté nu jusqu’à ce que mon mari arrive et me couvre de sa veste.
Ensuite il a couru dans la rue pour avoir une ambulance ou trouver quelqu’un pour nous aider à sortir de la maison les tués et les blessés. Il n’a pas trouvé d’ambulance ou de camion de pompiers. Ses cousins Matar et Muhammad-Hikmat Abu Halima qui vivent à côté de chez nous sont venus nous aider. Mon mari m’a soulevée et Nabilah sa tante a pris Farah. Une autre tante venue elle aussi nous aider a pris Aya.
Muhammad Farah Nabilah son fils ‘Ali ‘Omar Matar et moi sommes montés dans une remorque attachée à un tracteur. Muhammad Hahmat nous a conduits à l’hôpital Kamal ‘Adwan Hospital. Nous avons aussi emmené le corps du bébé Shahed. Nous avons laissé les autres dans la maison.
Sur le chemin nous avons vu des soldats à environ 300 mètres de la Place al-‘Atatrah. Muhammad a arrêté le tracteur et soudain les soldats ont ouvert le feu sur nous. Ils ont tué Matar et Muhammad-Hikmat. ‘Ali a été blessé et a réussi à s’enfuir avec Nabilah et ‘Omar.
Les soldats ont demandé à mon mari de se déshabiller ce qu’il a fait. Ensuite il s’est rhabillé et les soldats nous ont dit de continuer à pied. Nous avons laissé les trois corps dans la remorque. Mon mari Farah et moi avons marché vers la place où nous avons pu monter dans une voiture qui passait. Il nous a emmenés à l’hôpital A-Shifaa. Il était environ 18h quand nous sommes arrivés à l’hôpital.
Je suis toujours hospitalisée. J’ai le corps entièrement brûlé et aussi le visage. Farah est brûlée au troisième degré.
L’hôpital nous a voulu nous envoyer en Egypte pour être soignées et a essayé de nous emmener à Rafah en ambulance mais l’armée nous a tiré dessus. Le chauffeur a été légèrement blessé au visage et il est reparti à l’hôpital. Maintenant nous attendons l’autorisation pour partir en Egypte. »
Ghada Riad Rajab Abu Halima 21 ans mariée mère de deux enfants habitant à Beit Lahiya Bande de Gaza.
Le témoignagne a été recueilli par Muhammad Sabah à l’Hôpital a-Shifaa le 9 janvier 2009.
Source : BTselem
Traduction : MR pour ISM