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Nai Barghouti de Ramallah au Festival dAix

lundi 9-juillet-2018

A 21 ans Nai Barghouti flûtiste et chanteuse palestinienne est l’une des plus jeunes ambassadrices de la musique arabe participant cette année pour la première fois à un opéra au Festival d’Aix-en-Provence.
Baignant dans la musique dès son plus jeune âge à Ramallah elle chante dans « Orfeo et Majnoun » une création 2018 mélangeant deux légendes fondatrices: Orphée et Eurydice et Majnoun Layla (Le fou de Layla) la plus célèbre histoire d’amour de la littérature arabe.
« Dans cet opéra on montre sur un pied d’égalité Qays et Leila et Orphée et Eurydice aucune civilisation n’est supérieure à l’autre. C’est très important » affirme à l’AFP Nai qui incarne Layla.

« Que des tragédies »

Elle dit s’enorgueillir de présenter du chant arabe devant un public occidental. « Nous sommes tout le temps évoqués dans les médias sous l’angle de l’occupation (israélienne) les guerres » assure cette jeune fille souriante aux cheveux bouclés.
« Il n’y a que des tragédies. On ignore les belles choses la musique les talents la culture de chez nous » ajoute-t-elle.
Basée depuis quatre ans à Amsterdam la jeune Palestinienne se fraye un chemin sur la scène européenne atterrissant à Aix après une tournée en 2016 en Grande-Bretagne avec la Palestine Youth Orchestra (PYO) suivie de concerts de sa propre initiative.
« Je cherche à mélanger jazz et musique arabe j’ai composé des chansons de ce style mais aussi retravaillé des chansons traditionnelles de manière contemporaine » dit-elle.
Basée depuis quatre ans à Amsterdam Nai n’oublie pas d’où elle vient.
« Quand on est Palestinien cela vous poursuit partout où vous allez » dit-elle qui a grandi avec des parents amoureux de jazz de classique et de chansons orientales.
« Etre artiste c’est dur mais être artiste palestinien est encore plus dur » souligne Nai -qui en arabe signifie flûte.
Formée depuis l’âge de sept ans à la flûte au Conservatoire National Palestinien Edward Said du nom de l’intellectuel et musicologue palestino-américain décédé en 2003 elle se rappelle de l’enfer pour ses déplacements notamment quand elle voulait jouer à Jérusalem.
« J’allais chaque semaine jouer et je devais passer par le barrage de Qalandiya entre Ramallah et Jérusalem. Il y avait soit du gaz lacrymogène lancé soit un soldat qui vous empêche d’entrer » se rappelle la jeune fille qui se rend encore dans les Territoires deux fois par an.
« D’habitude pour un étudiant en musique le plus grand souci c’est de bien se préparer pour le cours. Pour les Palestiniens on doit quitter quatre heures plus tôt à cause de ces problèmes. Ce n’est pas normal » assure-t-elle.

« Egalité des droits »

Et en tant que femme la peine est double. « Il y a beaucoup de pression de la société qui n’accepte pas qu’une fille chante » dit-elle estimant avoir eu la chance d’être « protégée » par ses parents.
Elle balaye la question épineuse de savoir si elle chanterait ou jouerait aux côtés d’Israéliens.
« La paix ne se fait qu’après avoir atteint une égalité des droits (entre Palestiniens et Israéliens). Tant que ce n’est pas le cas quand je m’assois aux côtés d’un Israélien il y aura toujours l’occupation entre nous » dit-elle.
Parmi les rares exemples réunissant les deux bords le West-Eastern Divan Orchestra créé en 1999 par le chef d’orchestre israélo-argentin Daniel Barenboim.
« Je ne suis pas contre les Israéliens pour le seul fait qu’ils sont Israéliens notamment ceux qui soutiennent notre cause » dit Nai.
Mais vu le service militaire obligatoire en Israël « comment voulez-vous que je joue aux côtés de quelqu’un qui a porté ou va porter un fusil et va m’interdire d’entrer à Jérusalem ? » demande-t-elle.
Son rêve ? « Fonder un institut de musique en Palestine qui livrerait des diplômes apprendre la musique au plus grand nombre de gens. C’est l’arme la plus puissante » assure-t-elle.

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